Les points-clés du 11 Septembre

La rubrique « Points-clés du 11-Septembre » réunit 11 articles factuels qui s'appliquent à rapporter les principaux faits relatifs au 11-Septembre, avec un souci d'objectivité et dans le respect des règles du journalisme : citation des sources, recoupement de l'information, recherche de la contradiction.

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L'enquête sur les attentats du 11 Septembre : une enquête non grata

Posté par Christo le 03/09/2009

Dernière mise à jour de l'article : le 27 novembre 2011
 
Le gouvernement Bush s'est opposé à ce qu'une enquête ait lieu sur le 11 Septembre. Ce n'est que sous la pression médiatisée des familles de victimes qu'une Commission fut finalement mise en place ... mais l'enquête fut pilotée par la Maison Blanche et entachée d'obstacles et d'obstructions répétés ; et les conclusions du rapport furent rédigées avant même que ne commencent les auditions de la Commission.
 
 
 
« Pouvez-vous croire qu’à la suite d’un tel attentat, le gouvernement ne voulait même pas ouvrir une enquête ? » s’exclama Ralph Nader, candidat indépendant aux élections présidentielles américaines de 2008, au cours d’une interview filmée lors d’un meeting de campagne à Cincinnati. 
CBS News, 23 mai 2002
 
L'administration Bush était effectivement opposée à ce qu'une enquête ait lieu sur les attentats du 11 Septembre (CBS News, 23/05/02). Ce n'est que sous la pression médiatisée des familles de victimes qu’une commission d’enquête fut finalement ordonnée le 27 novembre 2002 (Congrès des Etats-Unis, 27/11/02), soit 441 jours après les attentats. A titre de comparaison, il avait suffi de 9 jours pour qu’une enquête soit ordonnée sur l’attaque de Pearl Harbor, 7 jours sur l’assassinat de Kennedy, 7 jours également sur l’explosion de la navette Challenger, ou encore 6 sur le naufrage du Titanic.

 

La Commission fut composée d’un nombre égal de représentants des deux partis – 5 Républicains dont Thomas Kean nommé président et 5 Démocrates dont Lee Hamilton nommé vice-président – mais elle n’avait en réalité que l’apparence d’une commission non partisane. Elle fut bien au contraire étroitement pilotée par la Maison Blanche.

       
        Condoleezza Rice et Philip D. Zelikow
En effet, le poste de Directeur exécutif de la Commission d’enquête fut attribué au Républicain néo-conservateur Philp Zelikow, un proche collaborateur de la secrétaire d’Etat Condoleezza Rice et membre du gouvernement de transition de Bush fin 2000 et début 2001. De l’aveu même des président et vice-président Kean et Hamilton dans leur livre Without Precedent : The Inside Story of the 9/11 Commission paru en 2006, c’est Philip Zelikow qui avec son staff administratif fut chargé du travail d’enquête (T. Kean et L. Hamilton, 2006, p.38 ; P. Shenon, 2008, pp. 69-70, 81-86). Les Commissionnaires quant à eux étaient chargés de conduire les audiences et les entretiens sur la base des éléments que leur mettaient à disposition Philip Zelikow et les services gouvernementaux (T. Kean et L. Hamilton, 2006, pp. 269-270). Dans une interview à CBC News le 21 août 2006, le vice-président Lee Hamilton a reconnu que « de nombreux sujets soumis à l'attention de l'équipe [dirigée par Zelikow] n'ont pas été transmis à la Commission. [...] La plupart des sujets ne sont pas parvenus directement jusqu'à moi. [...] Le groupe de travail a filtré nombre de ces choses » (CBC News, 21/08/06, pp.5 et 8). Par ailleurs, comme l’a montré le célèbre journaliste du New York Times Philip Shenon dans son livre d’investigation The Commission: The Uncensored History of the 9/11 Investigation, non seulement Philip Zelikow dirigea l'enquête, mais c'est également lui qui dirigea la rédaction du rapport final que les Commissionnaires ont simplement annoté et co-signé. Le plan détaillé et les conclusions du rapport avaient même été rédigés dès mars 2003, avant même que ne commencent les auditions de la Commission (P. Shenon, 2008, pp. 388-389, 317-324 et 394-396).


De plus, la Commission fit l’objet d’obstacles et d'obstructions répétés de la part de la Maison Blanche et des services gouvernementaux, compromettant la crédibilité du rapport final :
 
  • L'octroi d'un budget et d'un temps imparti singulièrement restreints. Le budget initial que la Maison Blanche alloua à l’enquête ne fut que de 3 millions de dollars (Associated Press, 27/01/03), ce qui provoqua l'ire du leader de la majorité démocrate au Sénat : « c'est une blague ! » (P. Shenon, 2008, p.31). Le budget fut par la suite et tardivement porté à 14 millions de dollars après que des membres de la Commission et des familles de victimes se soient plaints publiquement (Washington post, 29/03/03 ; Wall Street Journal, 8/07/03). A titre de comparaison, les enquêtes sur les explosions des navettes Challenger (1986) et Columbia (2004) bénéficièrent d’un budget de 75 et 50 millions de dollars respectivement, et pas moins de 40 millions de dollars furent alloués à l'enquête sur l'affaire Clinton-Lewinsky. Quant au temps imparti pour mener l'enquête sur le 11 Septembre, la Maison Blanche voulait qu'il ne soit que de 12 mois. Il fut en définitive porté à 16 mois suite à un accord de compromis entre le Congrès et la Maison Blanche (Associated Press, 27/01/03 ; Wall Street Journal 8/07/03). Les manques d'argent et de temps sont autant d'obstacles qui ont conduit les président et vice-président Kean et Hamilton à affirmer dans leur livre Without Precedent que l'enquête fut « mise en place pour échouer » (T. Kean et L. Hamilton, 2006, chap.1). Regardez le témoignage de Lee Hamilton sur ces obstacles "dressés pour faire échouer l'enquête" au cours d'une interview accordée à la chaîne canadienne CBC :
 



  • L'interdiction de procéder aux interrogatoires des prétendus comploteurs en détention, au premier rang desquels Khaled Sheikh Mohammed - « cerveau » présumé des attentats (Note confidentielle de D. Rumsfeld, J. Ashcroft et G. Tenet, 16/01/04, p.26 ; T. Kean et L. Hamilton, 2006, pp. 118-126 ; New York Times, 2/01/08). Ainsi, toutes les déclarations que le rapport final attribue à ces détenus sont exclusivement des informations de troisième main transmises à la Commission par la CIA. Comme le reconnaissent Kean et Hamilton, la Commission n'avait « aucun moyen de vérifier la fiabilité des informations [...] fournies » (T. Kean et L. Hamilton, 2006, p.119). Or, c'est sur la base des aveux de Khaled Sheikh Mohammed et des autres détenus - « les seules sources disponibles sur le complot » (T. Kean et L. Hamilton, 2006, pp. 118/119) - que la Commission a pu établir un lien entre al-Qaida, Ben Laden et les attentats du 11 Septembre (Commission sur le 11/9, rapport officiel, juil. 2004, pp.145-155).
       
        K.S. Mohammed
    La fiabilité des aveux rapportés est d’autant plus sujette à caution que les détenus clés, dont Khaled Sheikh Mohammed, avaient été soumis à la torture du « waterboarding » lors de leurs interrogatoires par la CIA. Michael Hayden, directeur de la CIA, l’a admis devant la Commission du renseignement du Sénat américain le 5 février 2008 (Jurist, 5/02/08 ; The Australian, 7/02/08), puis un mémo rendu public par le Département de la Justice en avril 2009 révéla que Khaled Sheikh Mohammed fut torturé à 183 reprises en mars 2003 (New York Times, 20/04/09 ; Le Monde, 20/04/09). Ces révélations inspirèrent au journaliste du New York Times Philip Shenon le commentaire suivant : « Tout ceci jette un voile sur la crédibilité du rapport final de la Commission. Dans les cercles du renseignement, on n’accorde que peu de crédit aux témoignages recueillis sous la torture. Les études démontrent que les gens diront n’importe quoi si on les menace d’une douleur physique intense » (Newsweek, 14/03/09 - traduction française sur le site du Nouvel Obs). Quant aux ultimes confessions de Khaled Sheikh Mohammed devant une commission militaire en mars 2007, elles ne sont pas moins suspectes [1].
   
   
Max Cleland


  • L'interdiction de désigner les éventuels responsables de la débâcle du 11 Septembre (CBS News, 20/09/02 ; Newsweek, 22/09/02). Pas un seul haut-responsable n’a d’ailleurs été sanctionné ou démis de ses fonctions pour les incompétences grossières dont nous avons été témoins ce jour-là. Bien au contraire, les stupéfiantes défaillances de la défense aérienne ont été « sanctionnées » ... par des promotions (voir point-clé n°4).

 

La Commission publia son rapport final le 22 juillet 2004. Malgré les entraves rencontrées, les co-présidents Kean et Hamilton jugent avoir « correctement réussi à raconter l’histoire du 11 Septembre » (CBC News, 21/08/06, p.2). Un point de vue qui contraste avec celui du sénateur et membre de la Commission Bob Kerrey : « il y a de nombreuses raisons de soupçonner qu’il y ait une alternative à ce que nous avons exposé dans notre version » avait-il affirmé en juin 2006 (Salon, 27/06/06) [2]Un point de vue qui contraste également avec le bilan effectué par le Comité de Direction des Familles des Victimes qui révèle que la Commission n’a répondu de manière satisfaisante qu’à 30% des questions que les familles lui avaient adressées, laissant environ 250 questions en suspens (voir le rapport du Comité de Direction des Familles). Pour finir, un point de vue qui contraste avec les propos tenus par Lee Hamilton lui-même au cours d’une interview menée par la chaîne canadienne CBC en août 2006 : « je ne sais pas », « je ne me souviens pas », « je n’ai pas la réponse à votre question » sont les leitmotivs qui ponctuaient cette conversation [3] (transcript de l'interview traduit en français). 

 

L'objectif de la Commission était de « fournir un récit définitif des faits et circonstances relatifs aux attaques terroristes du 11 septembre 2001 » (gouvernement américain). Le résultat obtenu : un "rapport final" comportant une multitude d'incohérences, omissions et inexactitudes, dont vous trouverez de nombreux exemples dans cette rubrique « Points-clés du 11 Septembre ».
 
 
Par Christo pour ReOpen911
 

[1] Lors de cette audience qui s’est tenue à huis clos à Guantanamo, Khaled Sheikh Mohammed aurait de nouveau avoué avoir été l’organisateur des attentats du 11 Septembre, et il aurait également revendiqué 30 autres actes ou tentatives terroristes parmi lesquels l’opération du World Trade Center en 1993, l’assassinat du journaliste Daniel Pearl, l’attentat contre une boîte de nuit à Bali en octobre 2002 et celui perpétré contre un hôtel de Monbasa au Kenya en novembre 2002 (transcription de l'audition).

Ces aveux rendus publics par le Pentagone laissent subsister de nombreux doutes quant à la manière dont ils ont été produits et obtenus. Comme le résume le site Voltaire, « la Croix-Rouge Internationale n’a pas été autorisée à vérifier les conditions de détention de l’individu. Aucun médecin n’a été autorisé à vérifier si l’intégrité physique et mentale de l’individu avait été respectée. Aucun avocat n’a été autorisé à entrer en contact avec l’individu et à assurer sa défense. Aucun journaliste n’a été autorisé à assister à l’audition. Les noms des militaires présents ont été couverts par le secret-Défense » (site Voltaire, 16/03/07).

De nombreux commentateurs sont sceptiques sur la crédibilité de ces aveux :
Kenneth Roth, directeur exécutif de Human Rights Watch, affirme qu’il n’y avait aucun moyen de savoir si la confession était le résultat de tortures. Il ajoute : « nous devons savoir si cette prétendue confession serait suffisante pour le déclarer coupable dans le cadre d’un procès juste » (BBC, 15/03/07).
- Dans un article intitulé « Pourquoi la Confession de KSM sonne faux », l’ex-agent de la CIA Robert Baer affirme que Khaled Sheikh Mohammed « invente des choses ». Baer soutient notamment qu’il n’est pas le meurtrier de Daniel Pearl contrairement à ce qu’il prétend, et se demande s’il n’a pas « exagéré ou complètement fabriqué » d’autres aveux (Time, 15/03/07). 
- Geoffrey Corn, ancien avocat militaire et professeur de droit au Texas, s'étonne : « Il se revendique en gros responsable du moindre incident terroriste qui ait jamais eu lieu ! ». « Une confession doit être corroborée par des preuves » ajoute t-il (L’Expression, 17/03/07).

[2] Bob Kerrey réitéra ses propos en mars 2009 dans un article paru dans Newsweek : « il y a désormais des raisons de suspecter que nous nous sommes peut-être trompés sur certains aspects » du complot du 11/9 et sur Al-Qaida (Newsweek, 13/03/09).
 
[3] Malmené par le journaliste de CBC, Lee Hamilton finit par reconnaître que la Commission n'avait pas pu raconter toute l'histoire : « vous avez une limite de temps, vous n'avez pas un temps illimité, vous avez une limite de budget, vous ne pouvez pas suivre toutes les pistes, vous ne pouvez pas répondre avec certitude à chaque question […]. Je ne crois pas une seconde que nous ayons raison sur tout. Nous avons écrit une première version de l'histoire. Nous l'avons écrite sous une contrainte de temps importante, et nous avons fait le tri entre les indices aussi bien que nous le pouvions. Il serait plutôt remarquable que nous ayons tout juste [...]. Des gens vont enquêter sur le 11 Septembre pendant les 100 prochaines années dans ce pays, et ils trouveront des choses que nous avons oubliées » (transcript de l'interview traduit en français).


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