Faible retrait en Afghanistan, la guerre continue

L’ombre des 6 derniers soldats tués en Afghanistan planait jeudi sur le défilé du 14 juillet. Le compteur des pertes militaires françaises est donc porté au nombre de 70 alors que la France, précédée par les Etats-Unis, vient d’annoncer le début du retrait d’ici fin 2012. Le nombre élevé de victimes civiles, aussi bien dû à l’occupation qu’à la résistance, est tout aussi malheureux. D’un côté, l’OTAN s’est engagé en Afghanistan pour anéantir Al-Qaida suite au 11-Septembre en considérant comme secondaires les victimes civiles – éternels dommages collatéraux – alors que depuis le mois de mars, on constate que les principaux membres de l’Organisation sont engagés en Lybie pour « protéger les civils » tout en considérant comme secondaire leur soutien à des anciens combatants d’Al-Qaida. Les objectifs déclarés se sont révélés chaque fois évolutifs, l’engrenage chaque fois inévitable, et les conséquences chaque fois plus lourdes mais toujours jugées nécessaires et inéluctables.

Pendant ce temps, l’ONU ne fait plus figure que de simple caution morale et juridique aux aventures militaires des pays de l’OTAN, au-delà de ce qu’aucun autre pays au monde ne pourrait se permettre. D’autres pays en Asie ou en Amérique Latine par exemple, pourraient-ils se voir autorisés à faire ce que nous ou nos alliés faisons sur la scène internationale ? Cela ne démontre-t-il pas que les intérêts géostratégiques occidentaux prévalent indéniablement sur la morale et la justice universelle ?

La première victime de la guerre, c’est la vérité, déclarait Kipling, mais il est aussi difficile de se voir soi-même que de regarder en arrière sans se retourner, disait Thoreau. Cela n’a jamais été aussi vrai qu’en cette décennie guerrière débutée le 11 septembre 2001. A défaut de comprendre comment tout cela a commencé, sommes-nous au moins capables de savoir comment y mettre un terme ?

En attendant de lire nos journalistes professionnels sur ce sujet, voici un article édifiant du site Antiwar.com suite à l’annonce du retrait partiel américain par le président Barack Obama (prix nobel de la paix).


Pendant ce temps, les Afghans ne trouveront pas la démocratie sous les ruines de leurs maisons.

 


 Faible retrait en Afghanistan, la guerre continue

 
 
par John Glaser pour Antiwar.com le 22 Juin 2011
 
 
 
Le président Barack Obama a annoncé mercredi soir à la Maison Blanche son projet de retirer 10.000 militaires américains d’Afghanistan avant la fin de cette année, ainsi que la totalité des 33.000 éléments des forces de renfort d’ici la fin de l’été prochain. Jusque-là, près de 70.000 soldats resteront dans ce pays ravagé par la guerre, deux fois plus que lorsqu’Obama a pris ses fonctions. En 2014, déclare-t-il, notre transition vers un rôle de soutien en Afghanistan sera total.
 
Cette décision intervient après un long débat au sein de l’administration sur l’ampleur et le rythme du retrait. Mais les limites du débat à Washington sont trop étroites pour inclure une solution à long-terme à l’enlisement qui dure depuis 10 ans.
 
La pression exercée par les deux partis politiques a également pesé de tout son poids dans la décision d’aujourd’hui. Les Républicains ont fait part de leurs préoccupations concernant l’effort de guerre actuel, alors qu’un nombre croissant de Démocrates ont fait pression sur Obama pour un retrait total des troupes. Le peuple américain est pessimiste à propos de la guerre et 73% préfèrent un retrait substantiel pour cet été.
 
D’autres facteurs ont causé une diminution du soutien à l’effort de guerre. L’exécution d’Oussama ben Laden le mois dernier a ôté pour de nombreuses personnes tout objectif dans cette guerre. De plus, des responsables américains se sont engagés dans des négociations avec les Talibans dans l’objectif d’un règlement politique au conflit, qui pourrait inclure un accord de partage du pouvoir avec les leaders Talibans. Cela a conduit un certain nombre de personnes à douter de la nécessité de combattre contre ceux avec qui nous coopérons également.
 
Tandis que ces arguties sur le rythme de retraits partiels font les gros titres, les préoccupations sur une présence militaire permanente en Afghanistan sont croissantes. Le président afghan Hamid Karzaï a déclaré publiquement que ses entretiens avec les responsables américains incluaient la possibilité du maintient des troupes au-delà de 2014, année qui fixait officiellement le retrait total de toutes les forces étrangères. Des délibérations secrètes ont inclus apparemment un accord sécuritaire à long terme par lequel les militaires américains resteraient pour les décennies à venir.
 
Mais les coûts humains et économiques sont bien trop importants pour justifier un autre satellite militaire pour l’empire états-unien. La guerre en Afghanistan coûte au contribuable américain plus de deux milliards de dollars par semaine, ce qui est effrayant pour un électorat en proie à une récession économique grave. Le mécontentement croissant au sujet de la dette et du déficit renvoie à une responsabilité politique pour de telles dépenses.
 
La violence dans ce pays ravagé n’a cessé d’augmenter, le mois dernier étant le plus meurtrier pour les civils depuis 2007 et d’autres records de la sorte sont battus en permanence. Les relations du gouvernement américain avec le président Karzaï ont été tendues alors qu’il a émis les "derniers avertissements" envers l’OTAN pour qu’il arrête ses bombardements irresponsables qui tuent souvent de nombreux innocents.
 
Une enquête du Congrès américain, récemment publiée, a conclu que les efforts de construction de la nation en Afghanistan génèrent de la corruption et altèrent l’économie locale, ébranlant de la sorte les intentions américaines de stabiliser le pays. Les milices afghanes financées et entraînées par les Américains ont apparemment terrorisé les populations civiles locales, dans certains cas "battant, volant et même tuant en toute impunité."
 
En plus des conséquences gênantes de la politique menée par les Américains en Afghanistan, des problèmes émanent également de la stratégie globale.
 
L’administration Obama a rendu incertain le véritable objectif de la mission militaire en Afghanistan. Si le but est de démanteler et d’éradiquer la menace d’Al-Qaïda, la mission est accomplie de longue date. En 2009, on estimait les forces d’Al-Qaïda dans le pays à 100 unités et leur présence est maintenant trop limitée pour justifier les dizaines de milliers de soldats ou plus.
 
Les craintes, que le reste de la présence talibane menace l’Amérique ou pourrait abriter Al-Qaïda après un retrait, ne sont pas étayées par les faits. Les relations entre les deux groupes se sont détériorées, rendant la collusion improbable, et les Talibans n’ont pas d’objectif majeurs de politique étrangère en dehors de l’éviction des occupants étrangers. Ceci élimine de fait une menace directe pour la sécurité nationale des Etats-Unis et dès lors rend la poursuite de la guerre indéfendable.
 
Si la mission est plutôt de créer un gouvernement centralisé stable en Afghanistan, cela est de la même façon non viable. Il pourrait être efficace en étendant la présence militaire américaine à travers le monde - une fin en soi pour les planificateurs de la sécurité nationale - mais il demeure inefficace dans la lutte contre le terrorisme et pourrait en effet devenir un objectif primordial d’Al-Qaïda, élargissant leur circonscription par une présence militaire permanente dans le monde musulman.
 
La guerre en Afghanistan contribue également à une situation de plus en plus instable au Pakistan. Le président pakistanais Asif Ali Zardari a déclaré au Guardian que la guerre est en train de "déstabiliser le Pakistan et de sérieusement compromettre les efforts pour restaurer ses institutions démocratiques et sa prospérité économique après une décennie de dictature militaire."
 
L’annonce du retrait des troupes ce mercredi était peut-être plus drastique que certains l’auraient espéré à Washington, mais cela laisse l’empreinte d’une guerre et d’une occupation en cours qui n’est pas seulement inutile et meurtrière, mais empêche toute fin viable de la guerre menée contre le terrorisme par les Etats-Unis. 
 
 
 
Traduction : Vincent pour ReOpenNews
 
 

 
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3 Responses to “Faible retrait en Afghanistan, la guerre continue”

  • René M

    L’opinion Américaine en 2001 s’est laissée entrainer par la propagande mensongère dans les guerres en Irak et en Afghanistan et les a approuvées.

    Les opinions des pays de l’empire Otanien ont suivi de même, tantôt envoyant leur contingent, tantôt refusant (comme la France dans le cas Irakien)

    En 2011 les opinions des mêmes ont encore mordu à l’hameçon d’une propagande mensongère.
    Et entre nous soit dit cela n’est pas facile pour certains qui se trouvent dans la position de réclamer ici un retrait (en Afghanistan) et là tout au contraire (en Libye) appuient et soutiennent une autre guerre, soi disant de protection humanitaire.

    A voir cette vidéo sur la Libye, « Sarkozy combien d’enfants as-tu tués cette nuit ?  » :
    http://www.michelcollon.info/VIDEO-Sarkozy-combien-d-enfants-as.html
    Disons Non à toutes ces agressions impérialistes
    NON à TOUTES CES GUERRES.

  • René M

    Sur l’article d’Antiwar.com un passage intéressant est celui où il est évoqué le fait que le retrait si il se réalise en 2014 ne sera pas tout à fait total, en effet selon plusieurs analystes, une ou des bases permanentes resteront dans ce pays.

    C’est d’ailleurs là, au delà des mensonges initiaux, le véritable motif de la guerre Afghane, à savoir, assurer une présence géostratégique Américaine dans ce secteur vital pour l’acheminement du pétrole de la Caspienne, et plus généralement pour le positionnement dans cette région (comme dans bien d’autres endroits à travers le monde où des bases Américaines sont implantées)

    Lesquelles bases afghanes devront êtres singulièrement retranchées et fortifiées, en l’absence de tout le dispositif opérationnel actuel, Ce sera plutôt acrobatique non ?

  • H.

    Titre de Presse :

    « Barack Obama parle droits de l’Homme avec le dalaï lama, Pékin voit rouge »

    « Barack Obama parle droits de l’Homme avec le dalaï lama »

    La bonne blague !!!

    « Barack Obama parle droits de l’Homme »

    Ah ! ah ! Trop drôle !

    Obama / Droits de l’Homme
    Non, mais pincez-moi je rêve !

    Obama / Prix Nobel de la Paix !
    N’en rajoutez plus !

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