MEDIAS FRANCAIS: Veulent-ils l’extension des « guerres » en cours ?

 

L’Histoire semble se répéter. Nous ne questionnerons jamais assez le lien étroit existant dans notre pays entre industries de l’armement avec leurs débouchés commerciaux, et les rédactions de nos medias. Songeons aux deux derniers conflits mondiaux: les liens entre Etat, armée, renseignement, presse, et même jet-set et "people", que ce soit du côté collaborationniste ou du côté résistant -à l’image de Josephine Baker par exemple-, ne se sont jamais démentis. La presse, la radio, les cinémas devenus des "Soldaten-Kinos" sous l’Occupation -dont est issu l’actuel circuit UGC- , surent nager en eaux troubles et se refaire une conduite à la Libération en s’appuyant sur la nécessité politique absolue d’effacer le naufrage de l’appareil d’Etat et économique de la France en 1940. Annie Lacroix-Riz parle même du "Choix de la Défaite", qui suscite toujours autant de réactions indignées. De Gaulle surfa sur cette vague consensuelle de renouveau national "imprimée" par le CNR qui fut vite oublié. Plus tard, si par exemple Mauriac parvint à publier ses bloc-notes dénonçant le premier la torture en Algérie, c’était gràce à son réseau de prêtres missionnaires certes, mais surtout ensuite gràce au célèbre couple trés américanophile JJSS-Françoise Giroud, fondateurs de l’Express.
 
 
La presse ne peut-elle être que cette coûteuse danseuse des intérêts géopolitiques de quelques-uns ? En tous les cas, les héritiers de ces libéraux d’hier ont vite appris, toujours dans le sillage des propagandes anglo-saxonnes. Celles-ci avaient en effet été rodées par des efforts massifs destinés à faire consentir à l’opinion publique américaine son soutien aux deux guerres. Les dernières "grandes manoeuvres en mer médiatique" n’annoncent toujours rien de bon.
 
 
 
 
 
 

 
France : les médias demandent que le pays se prépare pour une guerre mondiale
 
 
le 16 juillet en anglais, puis le 20 juillet en français
 
Par Kumaran Ira
 
Plusieurs grands journaux français réclament que les gouvernements européens augmentent leurs dépenses militaires pour se préparer à des guerres de grande envergure à l’avenir. Ces demandes et les scénarios sinistres que les médias exposent, sont un avertissement sérieux pour la classe ouvrière.

Participant des réductions des dépenses, en réponse à la crise de la dette souveraine, les gouvernements de par l’Europe annoncent une réduction temporaire ou un gel des dépenses de défense. La France prévoit d’économiser quelque 5 milliards d’euros sur trois ans, comprenant une réduction de 54.000 emplois dans les forces armées. Le budget 2011 pour la défense s’élèvera à 30,1 milliards d’euros, soit le même qu’en 2010.

Ces sommes sont considérées être totalement inadéquates par la presse bourgeoise de premier plan. Dans son éditorial du 3 juillet intitulé « Aux armes, citoyens européens. » le quotidien français de référence Le Monde écrit, « Dans un monde qui s’arme, l’Europe désarme. Sous le choc de la crise et la nécessité d’assainir leurs finances publiques, les pays européens taillent dans les budgets de la défense – massivement. C’est dangereux. »

Le 24 juin, le quotidien de droite Le Figaro publiait un article (réservé aux abonnés) intitulé « L’Europe, puissance militaire ? » de Thérèse Delpech, chercheur associé au Centre d’études et de recherches internationales (CERI) de Paris. Elle écrit, « L’avenir de la puissance militaire européenne, à un moment de coupes sombres dans les budgets de la défense, n’est pas une raison pour célébrer la paix européenne ou ‘la puissance soft’. Au contraire, c’est potentiellement inquiétant. » [retraduit de l'anglais]

De tels commentaires témoignent de la perspective de classe flagrante qui domine dans la presse. Les coupes massives dans les retraites ou le droit du travail sont applaudies, mais toute coupe budgétaire menaçant la capacité de la France à mener la guerre est inacceptable à l’ensemble de l’éventail de la presse bourgeoise.

En fait, la France consacre des ressources gigantesques à l’armée. En 2008, la France a introduit un livre blanc sur la défense, définissant l’orientation stratégique de l’armée française. Ce livre blanc accordait la stabilité du budget de la défense pour 2009-2011, puis une augmentation d’un pour cent pour 2012. Il accordait 377 milliards d’euros de dépenses pour la défense sur six ans. Les économies prévues dans les dépenses de la défense ne toucheraient pas les principaux programmes d’armement de la France : les avions Rafale, la modernisation des sous-marins nucléaires ou l’avion de transport militaire Airbus A400.

Comme le montrent clairement ces projets, l’objectif de la bourgeoisie française est de préparer des interventions impérialistes à l’étranger, soit aux côtés des Etats-Unis, soit pour rivaliser avec eux.

Le Monde écrit, « La défense, pour un continent comme l’Europe, c’est la capacité à justifier ses ambitions stratégiques (en a-t-elle encore ?) ; c’est l’aptitude à projeter sa puissance sur des théâtres éloignés où se joue une partie de son avenir économique ; c’est la possibilité d’intervenir pour s’interposer sur un autre continent… Bref, tenir son rang parmi les puissances de l’époque. »

 


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Il y a un prix à payer au privilège d’être une puissance impérialiste majeure, poursuit Le Monde. Faisant remarquer que « la majorité des pays européens consacre moins de 1.5 pourcent de leur produit intérieur brut (PIB) à la défense. » écrit-il, « Les Etats-Unis entendent rester une des grandes puissances militaires de leur temps – avec plus de 4 % de leur PIB consacré à la défense ; les Russes de même, en plein effort avec plus de 5 % ; les Chinois plus encore… »

L’article de Delpech présente des scénarios à faire froid dans le dos, dont celui d’une guerre mondiale conduite par les Etats-Unis et l’Europe contre la Chine, dans laquelle la France interviendrait pour aider à stopper l’approvisionnement en énergie de la Chine au Moyen-Orient.

Elle écrit, « L’Asie est encore largement perçue en Europe comme un partenaire économique, alors même que les Etats-Unis la considèrent à juste titre comme un problème stratégique potentiel. Bien plus près de nous, le Moyen-Orient n’est souvent compris qu’en termes de conflit arabo-israélien, quand même au-delà de l’énigme nucléaire iranienne, il existe bon nombre d’autres questions qui méritent que l’on s’y attarde : la nouvelle politique régionale de la Turquie ou le destin de l’Egypte et de l’Arabie saoudite après que leurs dirigeants actuels ne soient plus. » [retraduit de l'anglais]

Delpech ajoute, « Les conflits potentiels du 21e siècle sont trop évidents pour que l’Europe se contente uniquement d’être un observateur. Même l’Asie n’est pas aussi éloignée que bien des gens voudraient nous le faire croire. La Chine est présente en Asie centrale, au Moyen-Orient, en Afrique et en Amérique latine, ce qui veut dire partout. » [retraduit de l'anglais]

Delpech traite la montée de la Chine comme une menace potentielle majeure pour ses intérêts mondiaux. S’il y a un conflit entre la Chine et l’Amérique, écrit-elle, les Européens « devront peut-être intervenir; au Moyen-Orient par exemple, pour aider à bloquer des routes maritimes. L’Europe est-elle prête à envisager ceci, voire même à le faire? » [retraduit de l'anglais] 

[photo NouvelObs : Nicolas Sarkozy à sa descente d'avion lors de son premier voyage en Chine, fin novembre 2007. Il y est retourné en avril 2010] 

Les dépenses militaires européennes ne visent pas uniquement des puissances hors de l’Europe, mais visent de plus en plus des relations stratégiques au sein même de l’Europe.

Le déclenchement de la crise de la dette d’Europe méridionale, à commencer par la crise de la dette souveraine de la Grèce, a aussi généré des tensions au sein de l’Europe, notamment entre la France et l’Allemagne. En mai dernier, quand l’Allemagne traînait les pieds pour donner son accord au renflouement de l’euro pour rembourser les banques détentrices de la dette grecque, le président français Nicolas Sarkozy aurait menacé de quitter la zone euro. Le directeur de la Banque centrale européenne Jean-Claude Trichet a dit que la situation internationale était la plus difficile depuis le début de la Deuxième Guerre mondiale.

Les mesures d’austérité à mettre en place menacent la classe ouvrière et la base industrielle de toute l’Europe. Dans le système d’Etat-nation, ceci pose inévitablement la question de savoir qui maintiendra une base industrielle suffisamment forte, capable de soutenir une armée importante. En effet, la rivalité économique dans une situation de dépression mondiale prend également le caractère de rivalité militaire.

 

Ecrivant dans Le Post, Jean-Pierre Chauvin fait remarquer que les pays européens « redoutent un déclassement des forces armées et un décrochage industriel, qui auraient des conséquences à long terme sur l’emploi, l’économie, la souveraineté, la puissance même du pays [la France]. »

Evoquant la défaite militaire de la France en 1940, au début de la Deuxième Guerre mondiale, il ajoute, « L’histoire de France, aiment-ils rappeler, et notamment la période qui précède la Seconde Guerre mondiale au cours de laquelle Paris a assisté sans réagir au réarmement allemand, devrait pourtant servir de leçon. »

Au même moment, la classe dirigeante française approfondit sa relation économique et politique avec la Russie (photo: Hervé Morin salue Dmitri Medvedev devant Bernard Kouchner le 1er Octobre 2009 à Moscou, Reuters), dont le principal partenaire commercial bilatéral européen est l’Allemagne. En 2009 la France et la Russie ont échangé 14 milliards d’euros de marchandises, alors que le volume d’échange entre l’Allemagne et la Russie était de 44 milliards d’euros.

En juin, le président Sarkozy s’est rendu en Russie pour participer au Forum économique international de Saint Petersbourg. Accompagné de groupes d’affaires, Sarkozy a supervisé la signature de quelques 25 contrats, concernant des accords sur l’alimentaire, l’énergie, les transports et l’aérospatiale entre des entreprises françaises et russes. Ils sont estimés à 5 milliards d’euros. Les compagnies énergétiques françaises GDF-Suez et EDF (Electricité de France) ont acheté respectivement 9 et 10 pour cent de parts dans les pipelines de gaz North Stream et South Stream de Russie.

Ceci est lié à une relation militaire en train de se développer. En mars dernier, la France avait annoncé que des négociations avaient débuté pour la vente à la Russie de quatre navires d’assaut amphibiens classe Mistral (photo ci-contre). 

Dans son discours principal Sarkozy avait dit, « J’ai une conviction, c’est que l’Europe et la Russie, nous devons travailler ensemble de façon stratégique, de façon très proche et dans un rapport de confiance. » Il avait ajouté, « La guerre froide, c’est fini. Le mur, c’est fini. La Russie est une grande puissance, nous sommes des voisins, nous avons vocation à être des amis. Nous devons nous rapprocher. »

Les accords de la France avec la Russie, visant à rivaliser avec l’Allemagne, sont le signe de tensions stratégiques grandissantes au sein de l’Europe. De plus en plus, elles comprennent une rivalité avec des puissances autres que les Etats-Unis et les principales puissances de l’OTAN.

L’élite dirigeante française s’inquiète de la pénétration chinoise croissante dans le marché européen. Depuis l’annonce par la Grèce de la privatisation de sa compagnie publique de chemin de fer OSE, une des mesures clé que la Grèce doit prendre selon l’accord de renflouement de 110 milliards d’euros signé avec l’Union européenne et le Fond monétaire international, l’opérateur des chemins de fer français SNCF s’y intéresse.

Selon divers rapports, les entreprises chinoises cherchent aussi à acheter des parts dans les chemins de fer grecs. En juin, la Chine a signé des accords commerciaux d’une valeur de plusieurs milliards d’euros avec la Grèce, considérés comme le plus important investissement unique de la Chine en Europe. Les entreprises chinoises ont signé 14 accords dans les secteurs de la construction navale, du tourisme, du bâtiment et des télécommunications.

Le 1er juillet, le ministre français des Transports, Dominique Bussereau s’est rendu en Grèce et a signé un « accord de coopération stratégique dans le domaine du transport ferroviaire » avec son homologue grec Dmitris Reppas. Bussereau a ajouté, « Je regarde froidement la réalité : si la France ne se mobilise pas, d’autres et pas seulement des Européens, le feront à sa place. »

 


Notes ReOpenNews:

 

 


 

 

 





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