Le procès d’Omar Khadr, l’enfant-soldat incarcéré à Guantanamo en 2002

 

L’Organisation des Nations Unies estime à 300.000 le nombre d’enfants enrôlés dans des forces armées de par le monde. Dès l’entrée en guerre contre les moudjahidins en 1994, l’utilisation de ces enfants-soldats a perduré au sein des groupes talibans après la chute du régime en 2001. Cette année-là, 20 % des enfants de moins de 18 ans étaient utilisés comme soldats par les talibans. En 2004, près de 4 000 d’entre eux ont pu être démobilisés avec l’aide de L’UNICEF.

En 2002, Omar Khadr âgé de 15 ans, fut accusé (sans preuves tangibles) de crime de guerre et d’acte terroriste pour avoir tué un soldat américain sur le sol afghan. Envoyé à Bagram en Afghanistan, après interrogatoires et tortures, il fut expédié au centre de détention illégal de Guantanamo. Son procès s’ouvre ce 10 Août 2010 au bout de 8 ans d’emprisonnement. Le ressortissant canadien, maintenant âgé de 23 ans, passe devant une commission militaire pour être jugé par cinq officiers dont les noms sont tenus secrets.

Pour rappel, le président Barack Obama avait annoncé au début de son mandat la fermeture du centre de détention de Guantanamo pour janvier 2010 et la fin des commissions militaires pour juger les détenus.  Vaines promesses. Par ailleurs, la Cour Pénale Internationale stipule qu’un enfant de moins de 18 ans ne peut être jugé pour crime de guerre, ce qui semble laisser les autorités US totalement indifférentes. A souhaiter que le verdict rendu à la suite de ce procès ne devienne pas un dangereux précédent pour les enfants soldats, otages des guerres. Omar Kadhr risque la prison à perpétuité.

Omar Khadr pendant un interrogatoire par des agents du service de renseignement canadien à Guantanamo


 

RadioCanada | 14 octobre 2008

Un Canadien à Guantanamo. Arrêté par les Américains alors qu’il était encore enfant, Omar Khadr est détenu à l’encontre des conventions sur les droits des enfants-soldats. Mais le gouvernement Harper refuse de demander son rapatriement…

 

 


 

Un enfant-soldat devant ses juges

 

Mustapha Sandid - leJDD.fr

Lundi 09 Août 2010

Mardi s’ouvre un procès inédit dans l’histoire des Etats-Unis. Omar Khadr, un enfant-soldat enrôlé par l’insurrection talibane va être jugé par une commission militaire sur la base militaire de Guantanamo. Une première sous l’administration Obama qui crée la polémique.

Pour la première fois depuis l’arrivée de Barack Obama à la Maison Blanche, un procès pour crimes de guerre va avoir lieu sur la base américaine de Guantanamo. Un double événement car le cas délibéré sera aussi sans précédent. Un jeune homme de 23 ans, Omar Khadr, va être présenté devant les juges d’une commission militaire. Un dispositif créé par George W. Bush et relancé avec de nouvelles dispositions par l’administration Obama l’année dernière, alors que les prisonniers récemment jugés l’avaient été devant une cour fédérale. Arrêté en juillet 2002, le jeune homme est accusé de "crimes de guerre" et d’"acte de terrorisme". A l’époque des faits, Omar Khadr, né en 1986 à Toronto, n’avait que 15 ans. Il encourt la réclusion à perpétuité, après avoir déjà passé un quart de sa vie en prison.

L’histoire de ce jeune homme est digne d’un roman policier. Fils d’un djihadiste convaincu, Omar Khadr a neuf ans lorsque son père l’emmène en Afghanistan. Enrôlé de force au sein du djihad taliban, il est utilisé sans se douter, selon des experts canadiens, qu’il allait participer à une opération meurtrière. Le 27 juillet 2002, il aurait tué le sergent Christopher Speer en lançant une grenade sur un convoi de l’armée américaine dans la ville de Khost. Un acte pour lequel, défendent ses avocats, il y a peu, voire "pas du tout" de preuves. Il est néanmoins considéré par l’armée américaine comme un "combattant ennemi" en dépit de son jeune âge. Les autorités avancent des "aveux" qu’Omar Khadr aurait faits. Lui dénonce des tortures répétées lors d’interrogatoires sur la base aérienne de Bagram en Afghanistan et dans le camp militaire de Guantanamo.

Un procès sous le feu des critiques

La perspective du procès soulève un tollé au Canada. Dans le pays de naissance du jeune homme, des groupes de défense et des ONG se sont mobilisés pour dénoncer ses conditions de détention et réclamer son rapatriement. "A jamais, on se souviendra que l’administration Obama a relancé les commissions militaires avec le cas d’un enfant-soldat", a commenté Jon Jackson, l’un des avocats du jeune Canadien, lors d’une conférence de presse. Un appel qui n’a pas trouvé d’écho à Washington et à Ottawa où le premier ministre Stephen Harper a fait la sourde oreille.

De l’autre côté de l’Hudson, la presse américaine s’est emparée de l’histoire pour critiquer la politique judiciaire d’Obama. Le New York Times a soutenu dans un éditorial qu’Omar Khadr "serait la première personne depuis des décennies à être jugé dans l’Occident pour des crimes de guerre en tant qu’enfant-soldat". Un cas pour lequel les Etats-Unis ont signé une convention des Nations Unies afin de protéger ces mêmes enfants en cas de conflit mais dont a été exempté le jeune Canadien. Daphne Eviatar, la représentante de Human Rights First a également publié une tribune sur le site du Huffington Post , considérant que tuer un soldat lors d’un combat n’entre ni dans la catégorie du terrorisme ni dans celle du crime de guerre, tel qu’il est décidé par le droit international.

Bien que ses avocats se soient démenés en présentant de nombreux recours dénonçant le caractère injuste du procès et les accusations erronées, Omar Khadr a décidé de renvoyer ses avocats et de boycotter des audiences "jouées d’avance", tel qu’il l’a affirmé au juge militaire Patrick Parrish, le 14 juillet dernier, le jugeant "injuste". Estimant avoir été "manipulé" par Al-Qaïda dans sa jeunesse, il a indiqué : "Maintenant, je ne laisserai pas le gouvernement américain m’utiliser lui aussi à ses fins".

 


Guantanamo : l’ONU dénonce le procès d’un enfant devant un tribunal militaire

 

Radhika Coomaraswany, représentante spéciale du Secrétaire général sur les enfants et les conflits armés.

10 août 2010 – Alors que s’est ouvert mardi sur la base américaine de Guantanamo le procès d’Omar Khadr devant un tribunal militaire d’exception, la Représentante spéciale de l’ONU pour les enfants et les conflits armés, Radhika Coomaraswamy, a critiqué la tenue de ce procès, rappelant que « les enfants ne doivent pas être jugés devant des tribunaux militaires ».

En 2002, à Kost, en Afghanistan, Omar Khadr, ressortissant canadien alors âgé de 15 ans et combattant dans les rangs des Taliban, aurait jeté une grenade qui a tué un soldat américain. Arrêté et transféré sur la base américaine de Guantanamo, il a passé près de huit ans en détention, avant que son procès ne s’ouvre ce mardi.

« Tous ceux qui, comme nous, s’intéressent au bien-être des enfants, dont mon collègue Anthony Lake, le Directeur exécutif du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), ont contesté la tenue d’un procès contre un enfant de moins de dix-huit ans poursuivi pour crime de guerre », indique Radhika Coomaraswamy, dans un communiqué rendu public mardi.

La Représentante spéciale de l’ONU rappelle d’une part que les statuts de la Cour pénale internationale (CPI) stipulent clairement qu’une personne de moins de 18 ans ne peut pas être jugée pour crimes de guerre, d’autre part que devant d’autres tribunaux internationaux, les procureurs ont utilisé leur pouvoir discrétionnaire pour renoncer à poursuivre les enfants, et enfin que depuis la Seconde Guerre mondiale, aucun enfant n’a jamais été poursuivi pour un crime de guerre.

« Les enfants soldats doivent être considérés avant tout comme des victimes, d’autres procédures ayant pour finalité leur réhabilitation doivent être mises en place », insiste-t-elle, avant de souligner que même si Omar Khadr devait être jugé sur le territoire américain, « les normes de la justice pour mineurs sont claires, les enfants ne doivent pas être jugés devant des tribunaux militaires ».

Radhika Coomaraswamy estime que le procès d’Omar Khadr à Guantanamo « pourrait créer un précédent, qui risque de mettre en danger le statut des enfants soldats partout dans le monde ».

Elle rappelle également qu’au cours de la dernière décennie, « les membres de la communauté internationale ont travaillé ensemble pour protéger les enfants dans les conflits armés » et que « les États-Unis et le Canada ont ouvert la voie à la création et la mise en œuvre de ces normes ».

« Sans leur soutien, nous n’aurions pas été capables de persuader le Conseil de sécurité de créer un groupe de travail sur les enfants et les conflits armés, ni être en mesure de libérer des milliers d’enfants soldats dans le monde entier », poursuit-elle, avant de demander « instamment » aux gouvernements américain et canadien de parvenir à « une solution mutuellement acceptable sur l’avenir d’Omar Khadr, qui pourrait éviter qu’il soit reconnu coupable d’un crime de guerre qu’il aurait commis alors qu’il était un enfant ». 

 


L’UNICEF inquiet du procès d’un ancien enfant soldat à Guantanamo

Le Directeur général de l’UNICEF, Anthony Lake.

27 mai 2010 – Le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) a exprimé mercredi son « inquiétude » sur le procès à venir d’Omar Khadr, un détenu canadien arrêté en 2002 en Afghanistan alors qu’il était un mineur de 15 ans et emprisonné depuis 7 ans dans le centre de détention américain de Guantanamo.

« Il est le dernier enfant soldat détenu à Guantanamo », a déploré mercredi le Directeur exécutif de l’UNICEF, Anthony Lake. « Le recrutement et l’utilisation des enfants dans des conflits est un crime de guerre et ceux qui sont responsables, les adultes qui recrutent, doivent être traduits en justice », a-t-il ajouté.

Après avoir été arrêté en Afghanistan, Omar Khadr a été détenu à Guantanamo. Il est accusé de « crimes de guerre » par les Américains. C’est le dernier prisonnier occidental enfermé dans ce centre de détention. Poursuivre les mineurs pour des crimes de guerre « peut créer un dangereux précédent international », a indiqué M. Lake.

« Alors que l’ONU a célébré récemment les 10 ans du Protocole optionnel sur l’implication des enfants dans les conflits armés, nous appelons tous les gouvernements qui ont ratifié le Traité, y compris les Etats-Unis, à faire respecter l’esprit du Protocole », a dit Anthony Lake.

Les enfants devraient être traités « selon les standards internationaux de la justice juvénile qui prévoit une protection spéciale », a insisté le Directeur de l’UNICEF. Omar Khadr ne « devrait pas être poursuivi par un tribunal qui n’est ni équipé, ni prévu pour fournir ces protections et remplir ces standards », a-t-il conclu.

 


 

Vidéo : qu’en est-il des troubles post-traumatiques de guerre ? Voici des paroles d’adultes bouleversantes. Les enfants-soldats ? S’ils ne sont pas évoqués ici, et d’après ces témoignages, on peut concevoir le terrible traumatisme qui les habitera toute leur vie.

Voici le film "Sans blessures apparentes", documentaire de 63 minutes, tiré du livre du grand reporter Jean-Paul Mari qui fut dépêché à Bagdad en avril 2003. Ce film a été diffusé sur Fr2 dans l’émission "Infrarouge". Il a reçu le Grand Prix FIGRA et le Prix du Public 2010.

Attention, cette vidéo est déconseillée aux personnes sensibles.

SANS BLESSURES APPARENTES (1)

 


ReOpennews

En lien avec l’article

  • Affaire Omar Khadr: la Cour suprême entendra la cause du gouvernement Harper / par CJPMOMondialisation.ca, 14 septembre 2009
  • Canada : Ottawa invite la Cour suprême à se mêler de ses affaires à propos d’Omar Khadr / Fannie Oliviera pour la Presse Canadienne et repris par internet-general.info 14 Novembre 2009
  • Les ex-enfants soldats d’Afghanistan brûlent d’envie de prendre la vie à bras-le-corps / UNICEF
  • Le procès Omar Khadr : un test pour les tribunaux militaires d’Obama / RFI le 9 août 2010 Par Frédérique Misslin
  • 2008 / site militant et pétition en pdf pour le rapatriement d’omar
    http://www.bringomarhome.ca/fr/accueil.htm

    http://www.alternatives.ca/IMG/pdf/petition_OmarKhadr.pdf

 

 


 

 

2 Responses to “Le procès d’Omar Khadr, l’enfant-soldat incarcéré à Guantanamo en 2002”

  • Blue Rider

    http://www.washingtonpost.com/wp-dyn/content/article/2010/08/12/AR2010081203354.html

    le procès d’Omar Khadr est reporté d’un mois suite à l’évanouissement de son avocat qui souffre de complications consécutives à une intervention chirurgicale.

    on n’est pas rendus…..

  • Kaneloon

    Je trouve ça abusé quand même. Ce jeune gamin de quinze ans pris dans un conflit armé a tué des soldats venus envahir le pays qu’il défend. On parle de crime de guerre alors que ce qui s’est passé a eu lieu dans le cadre d’une bataille. Que devrait-on dire des milliers de civils tués par des bombes américaines soit près de 40% des civils tués en Afganistan depuis le début du conflit?
    Tuer un soldat qui vient vous envahir c’est de la résistance pas du terrorisme. Et aller envahir un pays juste pour installer un pipeline dans le but de servir des intérêts économique c’est de la Piraterie à grande échelle.
    De plus si un jour les afgans sortent de ce conflit ça va leur faire pas mal de paperasse s’ils se mettent a crier au crime de guerre pour chaque balle américaine tirée.
    J’ai l’impression qu’il y’a un peu deux poids deux mesures quand on s’apprête à juger un gamin de quinze ans qui a lancé une grenade comme si c’était un Milosevitch alors qu’a côté de ça, on a pas la moindre preuve que les soit-disant cibles américaines lors des bombardement soient d’autentiques caches de talibans. Si ce gosse était américain et que la situation soit inversée, il serait décoré pour sa bravoure. Alors parler de crime de guerre c’est un peu déguelasse quand même…

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