La Maison-Blanche et la CIA accusées de falsification

La nouvelle suivante a fait l’objet dune dépêche de l’AFP et a donc été reprise dans de nombreux médias (CBS News, Le Figaro, etc.)


Par Richard Hétu pour http://www.cyberpresse.ca/


Ron Suskind

L’accusation est grave et pourrait justifier l’impeachment des responsables à la Maison-Blanche.

L’accusateur n’est pas le dernier venu: ancien journaliste du Wall Street Journal, Prix Pulitzer en 1995, Ron Suskind a déjà fait paraître deux livres bien documentés sur les coulisses de l’administration Bush. Dans son troisième, sorti hier aux États-Unis, il affirme que la Maison-Blanche a ordonné à la CIA de fabriquer de toutes pièces une lettre établissant un lien entre Saddam Hussein et les attentats du 11 septembre 2001.

L’existence de cette lettre est connue depuis décembre 2003, ayant été révélée par le correspondant à Bagdad du Sunday Telegraph de Londres. Daté du 1er juillet 2001 et adressé à Saddam Hussein, le document porte la signature de Tarir Jallil Habbush, chef des renseignements irakiens. Celui-ci y confirme que l’Irak avait accueilli sur son sol Mohammed Atta, qui allait devenir le principal pirate de l’air responsable des attentats du 11 septembre.

En 2003, plusieurs partisans de la guerre en Irak avaient cité cette lettre comme justification suffisante de l’invasion américaine. Habbush y révélait qu’Atta «a déployé des efforts extraordinaires et s’est montré fermement déterminé à mener l’équipe qui sera chargée d’attaquer les cibles que nous avons décidé de détruire».

Ron Suskind est le premier à prétendre que ce document est un faux.

«Absurde», a déclaré un porte-parole de la Maison-Blanche en parlant de l’accusation du journaliste. «Ridicule», a renchéri l’ancien directeur de la CIA George Tenet.

«Je n’ai jamais reçu d’ordre de ce genre de la part de la Maison-Blanche, pas plus qu’il n’y a jamais eu quiconque à la CIA impliqué dans ce genre d’activité à ma connaissance», a-t-il ajouté dans un communiqué.

La lettre falsifiée

Ron Suskind n’en a pas moins maintenu sa version des faits hier dans des entrevues à la télévision et à la radio. Il a cité parmi ses sources Rob Richard, ex-chef de la division Proche-Orient de la CIA. Dans son livre, intitulé The Way of the World, l’auteur décrit la scène suivante entre Richard et Tenet.

«Tenet se tourne vers Richard et lui dit: Écoute Marine (Richard est un ancien Marine), ça ne va pas te plaire, mais c’est comme ça.»

Et Suskind d’ajouter: «L’idée consistait à apporter la lettre à Habbush et à lui faire transcrire avec sa propre écriture sur un papier à en-tête du gouvernement irakien pour la faire paraître authentique. La CIA aurait alors emporté le produit fini à Bagdad et fait en sorte que quelqu’un la diffuse dans la presse.»

Dans son livre, Suskind affirme également que ce même Habbush avait informé un responsable des services de renseignement britanniques que l’Irak ne possédait pas d’arme de destruction massive. George W. Bush était au courant de cette information avant de déclencher la guerre, mais il a choisi de l’ignorer, selon l’auteur.

Autre allégation de Suskind: Habbush a été transféré de l’Irak en Jordanie par les services secrets américains, qui lui aurait versé cinq millions de dollars pour acheter son silence.

Mais qui, à la Maison-Blanche, aurait ordonné à la CIA de forger un faux document ? Dans son livre et ses entrevues, Ron Suskind ne donne pas la réponse à cette question, se contentant de rappeler que le bureau de Dick Cheney avait tenté d’établir un lien opérationnel entre l’Irak et Al-Qaeda dès le lendemain des attentats du 11 septembre 2001.

«Ce n’est pas le genre de délit, comme l’agression ou le vol, auquel correspond un châtiment spécifique» écrit Suskind en faisant allusion à l’écriture du faux. «C’est plus gros que ça. On parle d’une Maison-Blanche qui détourne sciemment une division du gouvernement, le genre de chose qu’on soulève dans une procédure de destitution

Les «scoops» de Ron Suskind

Ron Suskind n’en est pas à sa première accusation grave à l’endroit de l’administration Bush. En 2004, il a fait paraître The Price of Loyalty, s’appuyant sur les révélations de l’ancien secrétaire au Trésor Paul O’Neill pour accuser la Maison-Blanche de s’être fixé l’objectif de renverser le régime de Saddam Hussein dès janvier 2001.

O’Neill avait également confié à Suskind que le dossier américain sur les ADM de l’Irak ne reposait sur aucune preuve solide. Il avait en outre décrit le Président comme «un aveugle entouré de sourds».

Dans The One Percent Doctrine, paru en 2006, Suskind explorait les coulisses de la lutte antiterroriste, levant notamment le voile sur la torture d’Abou Zoubaydah, le premier membre d’Al-Qaeda capturé après le 11 septembre 2001. Le titre fait référence à une théorie formulée par Dick Cheney, en novembre 2001, dans la Situation Room de la Maison-Blanche: «S’il existe 1% de chances que les scientifiques pakistanais aident Al-Qaeda à construire ou à développer une arme nucléaire, nous devons le considérer comme une certitude

 


 





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