Les sales affaires en Irak et les médias britanniques

A la veille des élections au Royaume-Uni, l’ex-agent du Renseignement Annie Machon(*) publiait sur son site un exemple récent de désinformation pratiquée par le journal The Daily Mail, à l’occasion de la sortie d’un article génant pour le gouvernement travailliste de l’époque. Au delà de l’anecdote, Annie Machon pose la question du terrorisme "sous fausse bannière" pratiqué par les gouvernements, les armées et les Services de renseignements. En effet, certaines positions alambiquées du gouvernement Blair de l’époque s’expliquent bien mieux à la lumière de cette analyse. Annie Machon avait participé en novembre dernier à l’événement parisien "Vers la Vérité" avec Cynthia McKinney et Giulietto Chiesa. Elle est aux USA où elle participera les 14 15 et 16 mai à la conférence de Santa Cruz "Understanding deep politics" "Comprendre les dessous de la politique".

L’ex-agent du MI5, Annie Machon


par Annie Machon sur son blog, le 6 mai 2010

Un exemple intéressant de manipulation médiatique est apparu aujourd’hui dans les médias britanniques. La Grande-Bretagne est au cœur d’une élection générale et nombreux sont ceux qui pensent que le résultat va être très serré – l’opinion générale étant que le 3e parti, les Libéraux-démocrates pourrait faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre dans un parlement « suspendu » [sans majorité – Nldr]

Le Daily Mail, un des journaux nationaux les plus marqués à droite, a choisi aujourd’hui de publier le récit de la capture et du sauvetage de deux soldats britanniques en Irak en 2005.

La trame principale de cette histoire était que le gouvernement travailliste voulait sacrifier les soldats en refusant d’autoriser leur sauvetage, afin d’éviter un embarras politique. Cette histoire ressemble fort à une tentative de la part du Daily Mail d’encourager les militaires et leurs familles à voter contre le gouvernement en place, qui voulait sacrifier les vies de nos « boys » pour des raisons purement politiques.

Pourtant, je pense qu’il y a d’autres raisons derrière cette histoire. Beaucoup se souviennent du moment où la nouvelle a été publiée : deux membres des commandos britanniques aéroportés (SAS) travaillant comme agents infiltrés et déguisés en Arabes n’ont pas réussi à stopper leur véhicule à un « checkpoint », déclenchant une fusillade au cours de laquelle un Irakien trouva la mort et trois autres furent blessés. Les deux soldats furent arrêtés et emmenés au poste de police où les autorités découvrirent que leur voiture cachait des armes et des explosifs. L’armée lança ensuite une opération de sauvetage, défonçant le poste de police avec des tanks et poursuivant leurs cibles jusque dans un bâtiment de la milice tout proche, ouvrant le feu en chemin et sauvant leurs camarades. En somme, de l’héroïsme pur jus. Mais des questions évidentes demeurent :

1) Pourquoi diable ces deux soldats agissaient-ils déguisés et avaient-ils le coffre de leur voiture rempli d’armements ?

2) Quelles sont les raisons précises pour lesquelles le gouvernement était aussi embarrassé du point de vue politique à l’idée de dévoiler cette affaire ?

Selon moi ces deux questions sont liées. Les sales tours et les collusions sont courants dans l’armée et la communauté du Renseignement – c’est une tactique bien documentée qu’ils ont utilisée lors du conflit en Irlande du Nord pendant trois décennies. Mais qui étaient précisément les destinataires de ces armes ? Auraient-elles dû servir pour une future attaque à imputer aux insurgés ou à al-Qaida ?

En ce qui concerne le malaise au niveau politique, l’explication du Daily Mail – à savoir que le gouvernement britannique ne désirait pas à cette époque ébranler la souveraineté affichée des Irakiens – ne tient tout simplement pas debout. La question de l’embarras politique a bien plus de sens si l’on considère que le gouvernement britannique avait connaissance de l’usage par l’armée de sales tours, de collusions ou de terrorisme sous « fausse bannière » en Irak.

Bien sûr, tout ceci fait partie de tactiques standards utilisées par les armées et les services de Renseignement de beaucoup de pays. Il serait naïf de croire que cela ne se produit pas, mais c’est une tactique rétrograde, risquée et contre-productive.

Au 21e siècle, il est encore plus naïf de croire que de telles tactiques sont efficaces ou même acceptables dans un monde ou la diffusion de la démocratie et l’application des lois internationales et des droits de l’homme sont la voie à suivre.

par Annie Machon sur son blog, le 6 mai 2010

traduction GV pour ReOpenNews


(*) Dans les années 90, Annie Machon a travaillé comme agent de renseignements au MI5 anglais. Elle a démissionné pour pouvoir aider son ex-partenaire, David Shayler, à dénoncer publiquement ("blow the whistle") toute une série de crimes ; depuis les fichiers sur des hommes politiques, aux bombes de l’IRA qu’il était possible de stopper, en passant par les écoutes téléphoniques, les personnes innocentes emprisonnées à tort, ou encore la tentative illégale d’assassinat du leader libyen Kadaffi organisée en 1996 par le MI6 [service de renseignements extérieurs anglais – Ndlr]. Avec pour conséquence de devoir partir dans d’autres pays d’Europe, s’exiler en France, être arrêtée et emprisonnée, voir ses amis, sa famille, des journalistes être arrêtés eux aussi, et parfois condamnés. Elle est désormais écrivaine, experte des médias, et défenseur des libertés civiles, mais surtout, Annie Machon est l’un des fers de lance du mouvement pour la vérité sur les événements du 11 Septembre, parcourant ainsi régulièrement l’Europe et les États-Unis. Annie Machon est auteur du livre Spies, Lies and Whistleblowers: ME5, MI6 and the Shayler Affair qu’elle a a co-écrit, avec son ex-partenaire David Shayler, aujourd’hui épuisé et véritable collector. Ce livre avait été en effet dans un premier temps interdit de vente en Angleterre.


 





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