Le JDD a rencontré l’oncle de Khaled Sheikh Mohammed dit le « cerveau du 11/9″

Nous publions ici un article paru le 12 octobre 2008 dans le Journal du Dimanche, qui s’inscrit dans un contexte ambigu où l’attachée de presse de la Maison-Blanche, Dana Perino, décrétait lors d’une conférence de presse tenue le 11 septembre dernier que Khaled Sheikh Mohammed était le véritable cerveau des attentats du 11/9, semblant en cela justifier l’échec de la Maison Blanche à capturer Oussama ben Laden. Voici la vidéo de cette intervention :

Source http://www.informationclearinghouse.info/article20735.htm


"Allah est mon seul avocat"

Par Karen LAJON, à Karachi pour Le Journal du Dimanche du 12/10/2008

Khaled Sheikh Mohammed, cerveau présumé du 11-Septembre, est incarcéré depuis cinq ans à Guantanamo. Sa seule relation avec sa famille tient dans des lettres échangées avec son oncle, qui vit au Pakistan. 

Prisonnier à Guantanamo, KSM veut mourir en martyr. (Reuters) Numéro de matricule: 10024. Nationalité: "Pakistanais, Baloutche". Lieu d’incarcération: Guantanamo Bay, Cuba. L’envoi est signé "KSM". Trois initiales, misérables et fluettes, écrites au stylo rouge et apposées au bas d’un formulaire fourni par la Croix-Rouge internationale. Trois lettres frappées du sceau de la terreur: KSM, pour Khaled Sheikh Mohammed, le cerveau présumé des attentats du 11 septembre 2001. Mohammad Husain, son oncle, nous montre le document; au verso, la dernière lettre envoyée par Khaled à sa famille, datée du 17 septembre dernier.

Le quartier de Layri, au sud de Karachi, la capitale économique du Pakistan. Un enfer pour la police de la ville, un paradis pour qui veut disparaître. Deux bandes rivales s’y livrent une guerre sans merci qui a fait plus de 400 morts depuis 2004. A l’entrée de Layri, un check-point installé par des policiers qui n’envisagent pas un instant de pénétrer dans le coupe-gorge. Un jeune homme de la famille nous a accueillis à l’entrée du dédale et entraînés d’une ruelle à l’autre, pour finir devant une porte métallique, au sommet de très hautes marches. C’est ici qu’habite Mohammad Husain, 52 ans. L’oncle de KSM, une des rares personnes à être en contact avec le terroriste, est surveillé par les autorités pakistanaises. Il vit dans une semi-clandestinité. "Pas la peine d’aller se cacher dans les zones tribales ou ailleurs dans le pays, dit-il. Karachi est un véritable havre de paix pour qui veut se faire oublier.".

Des lettres transmises par Téhéran

Khaled Sheikh Mohammed a été arrêté en 2003. Ses premières lettres ont été écrites en 2005. Elles sont arrivées un an plus tard. Une à une, lentement. Elles ont été transmises à la famille par le gouvernement iranien. Un curieux cheminement qu’explique le lieu du domicile de la femme de Khaled Sheikh Mohammed: elle vit, avec leurs huit enfants, à la frontière irano-pakistanaise, côté iranien! Mohammad Husain râle: "Les Iraniens gardaient le courrier et la femme de Khaled est restée sans nouvelles." L’un des garçons de la maisonnée est entré dans la petite pièce dépouillée et étouffante où Mohammad nous reçoit. Il pose sur le lino malmené une mallette grise un peu cabossée. Dedans, des papiers, des photos: Khaled, en costume-cravate et quelques kilos en moins, une dizaine d’années avant son arrestation. Quelques compagnons proches, dont son neveu, Ramzi Yousef, qui a fait exploser une camionnette dans les sous-sols du World Trade Center en 1993, et qui est incarcéré à la prison de haute sécurité de Florence (Colorado). Des coupures de presse relatant leurs "faits d’armes" depuis que KSM est enfermé, lui, à Guantanamo Bay. Et les lettres. Vingt-cinq, au total.

KSM écrit sur des morceaux de papier de taille variable, souvent au stylo rouge. Ses courriers semblent avoir été écrits à la va-vite, sur le coin d’une table, au détour d’une visite des intervenants de la Croix-Rouge. Les premières lettres portent de nombreuses ratures. Difficile de savoir si c’est le fait des autorités américaines ou d’une autocensure appliquée par le prisonnier. Celui-ci explique qu’il est heureux de recevoir des nouvelles des siens. Le 15 décembre 2006, il écrit: "Merci à Allah, je viens de recevoir ma première lettre de Layri, Karachi. Les règles sont strictes. Je ne peux pas vous envoyer une photo de moi mais vous, vous pouvez. Les nouvelles doivent être sociales ou familiales mais jamais politiques ou centrées sur les moudjahidine." Sans cesse, il invoque Dieu: "Allah nous a donné un monde qui est bon pour nous et qui nous sauvera des tourments et du feu de l’enfer."

KSM s’exprime en ourdou ou en anglais, parfois en arabe. "Au début, c’était essentiellement de longs passages de hadiths, puis au fil des lettres il s’est livré davantage. Il a dit qu’il était serein, qu’on se reverrait dans un autre monde, le vrai, et qu’il était toujours candidat au martyre", résume son oncle. Malgré la censure, certains écrits de KSM sont sans retenue: "Ne vous préoccupez pas de ma défense, je suis mon propre avocat tout comme Allah est mon seul avocat. Le monde est un centre d’examens et ceux qui les réussissent seront heureux dans la mort. Nous parlerons de ma libération dans ce monde lorsque je serai devenu un martyr." Mohammad Husain se félicite que son neveu ne courbe pas l’échine, qu’il pratique le jeûne, en plus du ramadan, deux ou trois fois par semaine: "Cela lui apporte une force spirituelle, cela le rend fort. KSM a demandé à sa famille d’en faire autant. Mais eux, ils jeûnent le lundi, parce que c’est le jour de la naissance du Prophète."

L’oncle de KSM représente aujourd’hui le seul lien accessible avec le terroriste présumé. Que peut-on vouloir transmettre de cet homme? L’héritage est-il lourd à porter? "Non, rétorque Mohammad Husain. KSM est un remarquable moudjahidin. Il a parfaitement réussi contre les ennemis de l’islam." Que ce propos contraste avec le sourire bienveillant qui le ponctue! Husain est, dit-on, le diplomate de la famille. Un journaliste pakistanais qui connaît bien les proches de KSM le confirme: "Les autres sont tous des radicaux. Mohammad Husain est plus enclin au dialogue. C’est un politique. D’ailleurs, s’il veut communiquer aujourd’hui, c’est qu’il a une idée en tête." Dénoncer la brutalité des autorités américaines, vilipender la justice de l’administration Bush – "KSM devrait être jugé devant un tribunal civil et non devant une cour qui n’est même pas reconnue !" -, porter la parole de son "honorable et innocent" neveu.

La relève

De Khaled Sheikh Mohammed, on garde en mémoire le portrait, hagard, hirsute et mal rasé, en tee-shirt blanc douteux, lors de son arrestation en mars 2003 à Rawalpindi, la banlieue pauvre d’Islamabad. Il a ensuite été détenu dans un lieu secret, peut-être en Jordanie, avant d’être transféré à Guantanamo. Là-bas, sa situation s’est récemment améliorée. "D’après les lettres, le régime carcéral semble s’être assoupli, note son oncle. Il dit être en bonne santé et faire de l’exercice. Et il a pu constituer une petite bibliothèque depuis le mois de septembre." Hormis le Coran, il a demandé des ouvrages d’auteurs pakistanais, Patras Bukhari et Mushtaq Yousfi, deux humoristes qu’on dit féroces. Il est bien sûr seul dans sa cellule, il a droit à des promenades, et ses temps de prière sont désormais respectés.

Abdullahad, fils de Mohammad et petit cousin de KSM, a 15 ans, mais la silhouette malingre d’un gamin de 10 ans. Il est très fier de dire que pendant une semaine, en 2003, il a vécu avec le célèbre détenu de Guantanamo. Il en a vu, des choses, dans ce petit appartement de Rawalpindi! Mais il n’en soufflera mot. En revanche, il veut bien lâcher combien il admire cet homme et combien il hait l’Amérique. Son père intervient: "Il veut dire le gouvernement américain, pas le peuple." Eh oui, bien sûr, Abdullahad fera le djihad. Des études? Rien d’incompatible avec le combat: "Je serai ingénieur. Comme KSM! Et un jour, il y aura un autre 11 septembre!

3 Responses to “Le JDD a rencontré l’oncle de Khaled Sheikh Mohammed dit le « cerveau du 11/9″”

  • simon

    pas de contenu vraiment interessant concernant la réouverture d’une enquête sur le 11/09 dans cet article. Et apparement ces lettres ne contiennent rien sur la participation, l’organisation ou la non-organisation des attentats par ce monsieur détenu à Guantanamo.

  • sympathisant

    C’est justement ça qui est intéressant : la presse française nous fait un scoop à propos du « cerveau » du 11/9. Voilà un gars qui a tout organisé depuis sa banlieue de Karachi. Avec ses potes…

    Ils connaissaient sur les doigts de la main le calendrier de manoeuvres de l’US Air Force, les procédures des contrôleurs aériens, le maniement acrobatique des boeings, l’art de la bourse, l’état des WTC, la misère de Larry Silverstein, les sympathiques habitudes des chimistes de l’anthrax, les erreurs grotesques du FBI, et surtout, ah oui ! Surtout ils savaient que leur rodéo allaient plonger le monde dans un chaos sans précédent…

    Ah tiens… mais ce chaos, il profite à qui ? Quand on sait autant de choses on ne devrait pas en arriver, ce serait vraiment bête, à se faire prendre.

    Ben si ! Ils se sont fait prendre !
    Comme quoi, il y a toujours une justice, non?

  • Sébastien

    Pour comprendre un peu mieux le pourquoi du comment, l’analyse et l’enquête de celui que je n’hésite plus à qualifier de génialissime…

    http://www.voltairenet.org/article158318.html

    L’heure des bilans
    Condoleezza Rice, toujours « deux fois meilleure que les autres »
    par Thierry Meyssan*

    Le moment est venu de dresser le bilan de l’Administration Bush qui arrive au terme de son second et dernier mandat. Nous revenons aujourd’hui sur la dérive de Condoleezza Rice. Première femme noire à la tête du Conseil national de sécurité, puis du département d’État, elle suscitait les espoirs des féministes et des militants des droits civiques. Elle sera devenue en définitive, l’égérie du bellicisme WASP et du recours à la torture.

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