A propos de deux attaques

Avant même que ne disparaisse l’odeur de poudre brûlée de l’hôtel Taj Mahal à Mumbai (Bombay), les Etats-Unis donnaient déjà leurs instructions à l’Inde. Il ne fallait pas rater le coche et il fallait attaquer le Pakistan, pour la simple raison que la totalité des hommes armés des assauts terroristes survenus dans cette ville étaient apparemment venus par bateau du Pakistan voisin. Des responsables US, dont la ministre des Affaires Etrangères Condoleezza Rice, appellent l’Inde à s’engager à mener une enquête « transparente » et « approfondie » sur ces attaques afin de déterminer qui en étaient les responsables.

Quelle différence avec la réaction du gouvernement US américain aux attaques du 11-Septembre aux Etats-Unis !

Au lieu d’une enquête « transparente », nous avons eu droit à des séances secrètes des comités de renseignement au Congrès, des interviews de fonctionnaires aux postes clefs, du président Bush et du vice-président Cheney, réalisées à huis clos par la Commission sur le 11/9, et bien entendu, l’arrestation secrète de milliers de musulmans vivant aux Etats-Unis, dont beaucoup furent détenus des mois durant et tenus au secret sans chef d’accusation à leur encontre, parfois victimes de tortures et souvent déportés avec de fortes de chances d’être – à nouveau – arrêtés, torturés voire mis à mort.

Au lieu d’établir calmement ce qui s’était passé et qui étaient les responsables, l’administration Bush a regroupé des Saoudiens membres de la famille Ben Laden, et d’autres qui avaient des liens avec le régime d’Arabie Saoudite, pays d’où venaient la plupart de ceux qu’on a déclaré impliqués dans le détournement des quatre avions utilisés lors des attaques, et elle les a renvoyés chez eux par avion sans même essayer de les interroger.

Et puis, là aussi sur la base seulement d’un minimum de preuves, les Etats-Unis lancèrent dans les jours qui suivirent une guerre totale contre l’Afghanistan, dans le but de chasser et de détruire le gouvernement taliban. Peu après cette agression, l’administration Bush/Cheney déplaça son attention et lança une guerre totale encore plus grande contre l’Iraq, une nation qui n’avait pas le moindre rapport avec les attaques contre le Pentagone et le World Trade Center.

Voilà ce qui a tenu lieu de transparence et de réponse mesurée.

Nous avons là encore un exemple de la façon dont les Etats-Unis s’attendent à voir un certain type de comportement adopté chez les autres dans le reste du monde alors qu’ils en adoptent un autre pour eux-mêmes.

On dirait que nous, les US Américains, nous n’avons pas à agir de manière rationnelle, nous n’avons pas à prendre en ligne de compte les conséquences de nos actes, nous n’avons pas à obéir aux lois internationales, et nous n’avons pas à écouter les avis des autres. Si les Nations-Unies refusent de soutenir un de nos plans visant à attaquer et à renverser le gouvernement d’une nation souveraine, on aura qu’à le faire tous seuls. Mais les autres pays ne peuvent pas se permettre de se conduire de cette manière.

 

Il est une autre différence entre l’Inde et les Etats-Unis qui a émergé au travers de cette dernière atrocité. Après les attaques de Mumbai, le ministre indien de la sécurité a démissionné en reconnaissant que son ministère avait commis la faute de n’avoir pas détecté le risque d’une attaque qui était en préparation depuis six mois, et de n’avoir pas empêché des morts innombrables faute de préparation adéquate des forces de polices et des soldats en vue d’éventualités de ce type (la police et les soldats n’étaient pas munis des fusils pour snipers et à plan de visée optique qui leur auraient permis d’atteindre et de tuer certains des dix terroristes avec un minimum de risques pour leurs otages).

Personne n’a démissionné pour les multiples ratés qui ont conduit aux attaques du 11/9 et leur ont permis de se passer (certes, le directeur de la CIA George Tenet a reçu un poste moins important, mais seulement après avoir réçu les éloges du président Bush et avoir reçu une Médaille Présidentielle de la Liberté !). Personne n’a démissionné pour les ratés du renseignement, personne n’a démissionné pour les ratés de la défense aérienne, personne n’a démissionné pour les ratés de l’enquête, personne n’a démissionné pour les mensonges qui ont servi de base à l’attaque contre l’Afghanistan et à la guerre contre l’Irak. En fait, aucune responsabilité n’a été reconnue aux Etats-Unis pour la plus grande catastrophe qui a touché la sécurité du pays depuis Pearl Harbor. Alors qu’en Inde, il n’a fallu que quelques jours avant que le principal responsable de la sécurité au gouvernement ne démissionne de son poste après avoir été en disgrâce aux yeux du public.

Espérons que des esprits plus sensés l’emporteront quand il sera question de traiter avec le Pakistan, au fur et à mesure que l’histoire de cette dernière action terroriste sera dévoilée.

Et espérons que les US Américains demanderont à ce que l’on rende honnêtement des comptes sur ce qui s’est passé le 11 septembre 2001 et que ceux qui sont coupables d’avoir permis à ces événements de se produire et d’avoir envoyé leur pays à l’aventure dans un jihad au Moyen-Orient, à la fois inutile, sanglant et apparemment au bout du compte sans fin, seront dénoncés et forcés de payer pour leur incompétence et leurs crimes.

A cet égard, les medias privés établis nous aideraient bien en adoptant pour le 11-9 la même approche sceptique et curieuse de tout savoir qu’ils semblent avoir adoptée sur la tragédie indienne. Au lendemain des attaques de Mumbai, des journalistes célèbres mettent ouvertement en doute les sources gouvernementales et les experts en terrorisme quant à savoir qui était derrière les assaillants, jusqu’au point de laisser penser, comme l’a fait mardi Brian Jenkins de la Rand Corporation sur NPR (NdT : une radio publique), qu’il n’est pas inenvisageable d’imaginer que le gouvernement pakistanais les ait orchestrées (bien qu’il pensât que cela était l’explication la moins probable), ou que des « éléments voyous » des services secrets pakistanais aient pu être derrière celles-ci.

Quand on en arrive au 11-9, de telles hypothèses ne sont pas admises dans nos médias établis, malgré des faits avérés qu’il y ait eu, au moins, quelques connaissances préalables sur cette attaque, à la fois au sein de la communauté du renseignement US américaine et au sein du Mossad israélien (quelques jours avant les attaques, quelqu’un a misé de l’argent contre les actions des deux compagnies aériennes touchées par les détournements, et contre celles de deux grandes banques d’investissements dont les bureaux étaient dans les tours, et ce via la banque d’investissement Alex Brown dont le PDG est récemment devenu le n°3 de la CIA ; et des individus qui observaient les attaques en les filmant furent arrêtés par les policiers de New Jersey et plus tard libérés, sur intervention du ministère des Affaires Etrangères, après avoir été identifiés comme étant des agents du Mossad).  

 

Par Dave Lindorff, le 2 décembre 2008

Article original : http://www.thiscantbehappening.net/?q=node/239 (Les deux derniers paragraphes étant absent de : http://www.counterpunch.org/lindorff12022008.html)      

Traduction par Sacha Sher.

 

DAVE LINDORFF est un journaliste et chroniqueur basé à Philadelphie. Son dernier livre est Plaidoyer en faveur d’un impeachment (St. Martin’s Press, 2006, maintenant disponible en édition de poche). Son travail peut être lu sur www.thiscantbehappening.net. Il avait découvert que les boîtes noires des avions écrasés à New York avaient bien été retrouvées contrairement aux affirmations officielles. Journaliste d’investigation depuis 34 ans, c’est un chroniqueur régulier pour CounterPunch, et il écrit aussi fréquemment pour Extra! et Salon magazine, ainsi que pour Businessweek, The Nation et Treasury&Risk Magazine. Avant cela, il a écrit notamment pour Rolling Stone, Mother Jones, Village Voice, Forbes, The London Observer et le journal australien National Times. C’est également un artiste : http://www.myspace.com/davelindorff.

 

5 Responses to “A propos de deux attaques”

  • Pole

    « personne n’a démissionné pour les mensonges qui ont servi de base à l’attaque contre l’Afghanistan et à la guerre contre l’Iraq »
    Et Colin Powell ?
    Petites erreurs de traduction : Iraq en anglais, Irak en français.

  • Desk

    Powell a démissionné le 15 novembre 2004 avec trois autres ministres (éducation, agriculture et énergie), donc bien après son incroyable mensonge (jamais officiellement dénoncé) à l’ONU et surtout uniquement à la suite de l’élection du Président qui comme toujours entraîne des remaniements ministériels. Bush réélu, Powell aurait pu rester et dans sa lettre de démission, aucun indice sur le pourquoi de son départ : seulement qu’il est très content d’avoir permis deux guerres après avoir engagé la lutte internationale contre le terrorisme. Pas de démission rédemptoire de la part d’un vrai responsable, juste conséquence d’une fin de mandat présidentiel.

  • Vu la situation actuelle au Proche-Orient, je pense encore plus pertinent de rebondir sur la fin de l’article parlant du Mossad – peut-être supprimé par Counterpunch quoique Lindorff a pu le rajouter après coup comme la phrase sur Tenet :

    Sur http://www.thetruthseeker.co.uk/article.asp?ID=3655, l’enquêteur et ancien de la NSA Wayne Madsen nous apprenait dès 2005 que ces Israéliens arrêtés pour leur attitude suspecte (et qui allaient dire aux policiers : « votre problème ce sont les Palestiniens », la propagande était lancée…), appartenaient certes à une société de déménagement liée au Mossad, mais il précisait en outre qu’une de leurs camionnettes avait été vue garée tout près de l’adresse d’une des « étudiantes en art » israéliennes (et on sait que des membres de ce réseau d’agents masqués en « étudiants en art » vivaient tout près des futurs terroristes accusés, donc tous ces gens appartenaient peut-être à toute une équipe). A noter que le 11/9, il y avait deux camionnettes appartenant aux Israéliens, et repérées parce que leurs occupantsen habits arabes avaient été vus en train de se réjouir.
    Mais leur rôle n’était sans doute pas que de jouer les islamistes insensibles. Parce qu’une semaine avant, lorsque la société semi-étatique israélienne Zim abandonna ses locaux au WTC avant la fin du bail (perdant ainsi 50000 dollars d’acompte, ce qui avait surpris un collègue d’O’Neill, Michael Dick) « selon une source de la CIA sans couverture officielle (NOC) qui travaillait avec Dick, des déménageurs israéliens ont déplacé des explosifs dans les bureaux vidés du 17e étage après que Zim ait déménagé ».

  • looping

    Powell a peut être démissionné en 2004, mais ce sont les termes qu’il a employé lors de cette démission qui sont importants ; si je me souviens bien il a prononcé les termes suivants : « ce sont des fous », à croire qu’il venait d’apprendre une terrible vérité !!!

  • john

    c con c nul

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