Attaques à l’anthrax de 2001 : Fiasco total de l’enquête du FBI, même le Département US de la Justice le dénonce (avant de se rétracter)

Les événements se sont succédé ces derniers jours dans l’affaire des attaques à l’anthrax de … 2001 (!) En effet, le Département américain de la justice (DOJ) a reconnu officiellement – à travers des documents déposés dans le cadre d’une procédure en cours en Floride – que le coupable désigné par le FBI, à savoir le scientifique de l’armée Bruce Ivins, "ne disposait pas dans son laboratoire du matériel nécessaire à la production des spores utilisées lors des attaques", ce qui anéantit les conclusions de la plus gigantesque enquête jamais menée par le FBI, l’Amerithrax. Mais cette remise en cause n’a pas duré bien longtemps, et quelques jours plus tard, les avocats du gouvernement expliquaient que l’affirmation du DOJ ne contredisait pas les conclusions du FBI, et qu’Ivins restait le seul et unique coupable. En gros, la dissimulation ("cover-up") se poursuit, d’autant qu’Obama avait dès mars dernier mis son véto préventif à toute velléité d’une nouvelle enquête indépendante sur cette sombre affaire. On ne saura donc pas de si tôt qui sont les auteurs de ces attaques à l’anthrax de 2001, ni qui a essayé par la suite  de faire porter le chapeau à un autre scientifique de ce même laboratoire, le Dr Assad. En effet, comme l’explique le 2e article traduit dans cette ReOpenNews, une missive anonyme avait mis en cause le Dr Assad, un chercheur égyptien travaillant aussi à Fort Detrick, en l’accusant de l’envoi des lettres empoisonnées. Mais la piste des auteurs de cette dénonciation envoyée avant même que les attaques  à l’anthrax ne soient connues du public, n’a jamais été suivie par le FBI, malgré les promesses qu’elle contenait.

Rappelons que ces lettres empoisonées aux spores d’anthrax avaient visé à la fois des personnalités du monde politique hostiles aux lois PATRIOT ACT (finalement votées par le Congrès US dans la foulée et la psychose du 11-Septembre), et aussi du monde des médias US, ce qui a clairement fait comprendre à chacun que personne n’était à l’abri. Message apparemment bien reçu, et qui perdure dix ans après.

 

Bruce Ivins, le scientifique de l’armée US
accusé par le FBI d’être l’unique auteur des lettres empoisonnées
et qui s’est suicidé en 2008, juste avant d’être inculpé par le FBI.

 


L’auteur supposé des lettres à l’anthrax n’avait pas le matériel nécessaire

par Stephen C. Webster, pour RawStory, le 19 juillet 2011

Traduction GV pour ReOpenNews

Des documents judiciaires émis cette semaine par le Département de la Justice affirment que le Dr Bruce Ivins, un scientifique de l’armée supposé être l’auteur de l’envoi des lettres à l’anthrax à des membres du gouvernement et des médias en 2001, ne disposait pas de l’équipement nécessaire pour orchestrer ces attaques.

Malgré cet aveu [du DOJ] révélé par un reporter de PBS Frontline, les officiels expliquent qu’ils continuent de croire qu’Ivins était bien l’auteur de ce crime.  Ivins a été déclaré coupable essentiellement sur la base de preuves « circonstantielles », énoncées juste après son suicide en 2008.

Les attaques à l’anthrax ont tué cinq personnes et ont fait l’objet d’une enquête qui a duré plusieurs années. Malgré cela, un groupe de scientifiques indépendants a déclaré au début de cette année que le FBI n’avait pas suffisamment d’éléments scientifiques pour accuser quiconque.

Les éléments à charge, expliquent-ils, indiquent seulement qu’[Ivins] aurait pu être derrière les attaques, pas qu’il l’était effectivement.

L’accusation s’effondre de plus en plus, avec cette fois le Département de la Justice qui dépose des documents devant une Cour de justice de Floride, affirmant que le laboratoire d’Ivins « n’avait pas le matériel spécialisé nécessaire pour pouvoir effectuer la préparation des spores sèches qui ont été utilisées dans les lettres. »

Pour être précis, le "lab" d’Ivins ne disposait pas de l’équipement requis pour sécher les spores d’anthrax [et les transformer] en poudre qui puisse être expédiée à l’intérieur d’une lettre, ce qui remet sérieusement en cause l’affirmation du FBI selon laquelle Ivins était le coupable.

Ces documents déposés par le DOJ apparaissent alors que les avocats du gouvernement doivent s’occuper d’une affaire portée devant la justice par une des familles de victimes, qui demande des dommages civils pour le manque de contrôle de l’armée sur les spores d’anthrax.

Les avocats du gouvernement ont répondu qu’Ivins n’avait pas produit les spores d’anthrax dans le bâtiment de l’armée, mais ils n’ont indiqué aucun élément montrant qu’il aurait pu le faire ailleurs.

[Pourtant], pendant la procédure d’inculpation, le FBI a expliqué qu’Ivins était très certainement le coupable, car il passait de plus en plus de temps à l’intérieur de son laboratoire durant des semaines précédant les attaques à l’anthrax.

Le projet d’une enquête sur les attaques par un organisme indépendant a été immédiatement tué dans l’œuf par le Président Obama qui a menacé de son véto, arguant de certaines préoccupations dans le milieu du renseignement et du besoin de préserver la confiance du public envers l’investigation initiale du FBI.

Ces derniers aveux de la part du DOJ devraient faire l’objet d’un documentaire de PBS Frontline, qui a indiqué travailler à ce projet avec McClatchy Newspapers et Pro Publica.

Stephen C. Webster

RawStory, le 19 juillet 2011

 

Traduction GV pour ReOpenNews



Qui était derrière les attaques à l’anthrax?

De nouvelles preuves montrent que Bruce Ivins était un simple bouc-émissaire

par Justin Raimondo, sur Antiwar, le 20 juillet 2011

Traduction Martin pour ReOpenNews

L’aveu par le Département américain de la Justice que l’auteur présumé des attaques à l’anthrax n’avait pas les moyens de fabriquer l’anthrax dans son laboratoire n’est guère étonnant : après tout, il s’agit d’une enquête si mal ficelée qu’on se demande si son but réel était vraiment de découvrir le coupable.

Je n’hésite pas à affirmer haut et fort que le gouvernement américain s’est engagé dans une entreprise de dissimulation massive. Je sais qu’il s’agit  d’une accusation grave, mais je ne la porte pas à la légère : il est pratiquement impossible d’arriver à une autre conclusion étant donné tout ce que nous savons désormais.

Pour commencer, les faits établissent clairement que Bruce Ivins, le scientifique accusé d’avoir fabriqué et expédié l’anthrax – et qui s’est suicidé avant d’avoir été traduit en justice – est une victime, et que le gouvernement ne veut qu’une chose; clore cette affaire. Mais il n’y parvient pas. Les révélations les plus récentes proviennent d’une action en justice intentée par les parents de la  première victime du tueur à l’anthrax, qui accusent le  gouvernement de négligence et d’incompétence pure ayant entrainé la mort de Robert Stevens, photographe pour le groupe éditorial du Sun, basé en Floride. En réponse, les avocats du gouvernement ont présenté des éléments qui met à mal leurs propres accusations contre le défunt Bruce Ivins : (Source PBS – NdT)

« Cependant, le 15 juillet, les avocats du Département de la justice ont reconnu, au travers de documents judiciaires, que la zone scellée dans le laboratoire d’Ivins – la partie dénommée "partie-chaude" – ne contenait pas les équipements nécessaires à la transformation de l’anthrax liquide en poudre raffinée, comme celle qui flottait  dans les bâtiments du Congrès et certains bureaux de poste à la fin de 2001. »

« Le gouvernement a dit qu’il continuait de croire qu’Ivins était "plus probablement coupable que non coupable." Mais les documents présentés devant un tribunal de Floride n’expliquent pas où et comment Ivins aurait pu fabriquer la poudre (d’anthrax), ils disent seulement que le l’institut "n’avait pas les équipements spécialisés » dans le laboratoire spécialisé d’Ivins, équipement indispensable à la préparation des spores séchées comme celles utilisées dans les lettres. »

« Plus probablement coupable que non coupable » : quelle formulation [incroyablement] vague pour une telle affirmation – surtout quand l’enquête dont il s’agit ne concerne pas un crime ordinaire, mais les mécanismes d’un attentat qui a contribué à galvaniser l’opinion publique en faveur d’un conflit majeur !

Vous souvenez-vous de la panique qui a parcouru le pays comme un tsunami, les appels à la destruction de l’Irak par Andrew Sullivan et ses amis de l’époque du parti de la guerre ? Avez-vous encore en mémoire l’hypothèse initiale – étayée par des représentants du gouvernement américain – qui accusait les Irakiens ? L’hystérie générée par la terreur de "l’anthrax-dans-nos-boîtes-aux-lettres" fut un élément-cléf pour nous mener à la guerre d’Irak, et nous continuerons à subir les conséquences de cette décision pendant encore longtemps. Pourtant, le gouvernement américain a fait montre d’une incroyable désinvolture dans sa recherche des coupables des attaques à l’anthrax.

Vu qu’ils n’ont pas pu nous refiler le Dr Steven Hatfill – qui s’est défendu avec courage, et a été pleinement disculpé après une dure bataille qui a chamboulé sa vie – ils ont cherché un autre bouc-émissaire, et en ont trouvé un vraisemblable en la personne de Bruce Ivins. Le Los Angeles Times le décrivait comme ceci :

« Il errait sur le campus de l’Université de Cincinnati avec une arme chargée. Lorsque sa rage débordait, le crâne d’œuf spécialiste en microbiologie ouvrait le feu à l’intérieur de bâtiments vides, confondant une horloge murale ou d’autres objets avec une personne qui lui aurait voulu du mal. »

Bruce Ivins a été accusé par les médias, et [a été littéralement] poussé au suicide ; pourtant, ces mêmes médias ont depuis, rejoint plusieurs éminents politiciens et scientifiques qui contestent ce verdict. Le gouvernement a en effet admis que les preuves [Voir document pdf - NdT] contre Ivins étaient purement circonstancielles, et il est soumis à une pression croissante pour rouvrir l’enquête dont les principaux éléments à charge contre Bruce Ivins s’effondrent les uns après les autres. L’analyse dite « génétique » effectuée par le FBI, qui incrimine supposément Ivins, a depuis été réfutée. Cette dernière admission, fournie comme élément de preuve par les avocats du gouvernement lors d’une réclamation pour dommages et  intérêts pulvérise littéralement l’accusation contre Ivins. Et donc les questions demeurent : qui a mené les attaques à l’anthrax ? Qui a  terrorisé une nation entière dans la foulée des attentats terroristes du 11/9 ? Dans quel but ?

Pour les autorités, ce ne sont pourtant pas les pistes qui manquent. Comme je l’ai rapporté précédemment :

« Entre le moment où les lettres à l’anthrax on été envoyées et celui où l’affaire est devenue publique, le siège de la police militaire à Quantico en Virginie a reçu une lettre parlant d’un scientifique d’origine arabe qui avait travaillé dans les installations de l’USAMRID, un laboratoire de guerre bactériologique situé à Fort Detrick, [lettre] qui l’accusaient d’être un terroriste et de préparer  une guerre bactériologique imminente contre des cibles civiles aux États-Unis. »

« L’auteur de cette missive anonyme prétendait être un ancien collègue du scientifique, et semblait avoir une connaissance détaillée de la carrière de ce M. Assaad et de ses  habitudes de travail. Lorsque les lettres à l’anthrax furent ouvertes [par leurs victimes], le FBI rendit visite au Dr Assaad Ayaad, un ancien employé de Fort Detrick, et l’interrogea longuement. »

« [Non seulement] le FBI a très rapidement innocenté Assaad de toute  connexion avec les lettres à l’anthrax, mais il semble avoir par la suite abandonné cette intéressante piste  pour ne plus s’en occuper jusqu’à l’hiver 2004, date de démarrage d’une enquête sur la lettre de Quantico. Quel que soit l‘auteur de cette lettre, il semble clair qu’il avait eu connaissance à l’avance des attaques à l’anthrax, et que son identité pourrait très certainement permettre de remonter à la source de l’attaque. Pourtant, pendant des années, le FBI n’a rien fait : au lieu de cela, ils ont suivi la piste Hatfill, le filant partout, le diffamant et détournant ainsi l’attention du seul indice solide qui avait jusqu’ici fait surface dans cette affaire déroutante. »

Autant que je sache, les résultats de l’enquête de Quantico n’ont jamais été publiés. Les seuls médias à avoir prêté attention à ce fascinant et peu connu aspect du mystère de l’anthrax sont [le site Web] Salon, il y a quelques années, et le Hartford Courant qui a publié une série d’articles sur l’affaire de l’anthrax et sur la tentative d’implication du Dr Assaad.

Une chose est sure ; quelle que soit la personne qui a tenté d’impliquer le Dr Assaad, elle était en possession de certaines informations sur les véritables auteurs. Pourtant, le FBI n’a jamais montré la moindre intérêt pour cet aspect de l’affaire. Pourquoi donc ?

Le mystère s’épaissit lorsque nous apprenons que l’administration Obama a menacé d’opposer son veto à un projet de loi qui contenait un amendement prévoyant la réouverture de l’enquête de l’anthrax par un organisme (non-gouvernemental) d’experts indépendants. De quoi cette Administration [Obama] a-t-elle peur ? Que veut-elle protéger exactement ?

La réponse, je crois, se trouve dans les circonstances qui ont conduit les auteurs de la lettre de Quantico à choisir le Dr Assaad, en particulier, comme leur coupable.

Biologiste d’origine égyptienne travaillant à USAMRID au début des années 1990, Assaad fut la cible d’une campagne de haine sur son lieu de travail. Les auteurs de cette campagne étaient des employés [du laboratoire] qui l’avaient pris pour cible du fait de son origine arabe, et qui se sont donné beaucoup de mal pour propager cette haine: la série d’articles du Hartford Courant en donne un compte-rendu déchirant. Ce journal explique aussi qu’un membre de ce groupe est entré en dehors des heures de travail à l’intérieur de l’installation sécurisée où l’anthrax et d’autres toxines étaient stockées : une vidéo montre clairement qu’il y pénètre. En outre, il existe de nombreuses preuves d’expériences non autorisées effectuées par ce groupe. Les persécutions du Dr Assaad ont débouché sur  un procès, et les membres du "Camel Club" – comme ils s’appelaient eux-mêmes -  ont volontairement quitté Fort Detrick, et l’affaire s’est soldée par une transaction extra-judiciaire.

Pourtant, le harcèlement n’était pas terminé; il s’agissait juste d’une pause de quelques années, avant que le Camel Club ne frappe à nouveau, sous la forme de la lettre de Quantico, qui accusait Assaad d’être le cerveau arabe derrière les attaques à l’anthrax. Le fait que ce courrier [de dénonciation] soit parvenu à Quantico après l’envoi des lettres à l’anthrax, mais avant que leur existence ne soit rendue publique, est le genre d’erreur qui aurait dû permettre depuis longtemps de remonter aux véritables auteurs des attaques.

La question est : pourquoi n’est-ce pas le cas ? Ce qui est effrayant, c’est que les véritables auteurs sont toujours là. Sont-ils prêts à frapper à nouveau – et pourquoi est-ce notre propre gouvernement qui s’oppose à la réouverture de l’enquête ? Penser à tout cela me donne la chair de poule !

Justin Raimondo

Antiwar, le 20 juillet 2011

 

Traduction Martin pour ReOpenNews

(Certains liens URL ont été modifiés par la rédaction de Reopennews,notamment pour pointer vers des documents en français. Pour les liens originaux se reporter à l’article d’Antiwar)


En lien avec cet article :

 

Et aussi notre dossier ReOpen911 :

 


Livres en lien avec cet article :

Pour en savoir plus sur l’affaire de l’anthrax, lisez le remarquable ouvrage de Francis Boyle : "Guerre Biologique et Terrorisme", paru aux Éditions Demi-Lune

Ce livre traite d’un sujet trop ignoré bien que d’une importance considérable. Liant le développement des capacités militaires US en matière de guerre biologique aux attaques à l’anthrax sur le Congrès en octobre 2001, BOYLE jette une lumière nouvelle sur les vraies raisons de ces attaques : l’instauration d’un système politique liberticide et le développement phénoménal de la recherche US sur la guerre biologique qui s’accorde avec les projets néo-conservateurs de guerre préventive biochimique.

 

 

 


 

 

3 Responses to “Attaques à l’anthrax de 2001 : Fiasco total de l’enquête du FBI, même le Département US de la Justice le dénonce (avant de se rétracter)”

  • Shemesh

    Il est indispensable que Jerome Quirant nous
    explique en quoi il s’agit d’une théorie du complot et
    que bien entendu, Ivins est le seul coupable conformément
    à la version officielle.

  • Seb

    Il existe très probablement un lien entre le 11/09 et les attaques à l’anthrax, survenue juste une semaine après. Cette histoire sent très mauvais. L’affaire DSK est plus passionnante pour nos médias, cette société est profondément malade.

  • kidkodak

    Quand même pas rien:Un patron du FBI,Richard Lambert, responsable de l’employé ayant fait l’enquête sur l’Anthrax après le 11 septembre,a défini cette enquête comme étant une pure supercherie.
    HEAD of the FBI’s Anthrax Investigation Says the Whole Thing Was a SHAM
    Posted on April 17, 2015 by WashingtonsBlog
    Agent In Charge of Amerithrax Investigation Blows the Whistlehttp://www.washingtonsblog.com/2015/04/head-fbis-anthrax-investigation-calls-b-s.html

    On souhaite également que quelqu’un de l’intérieur se lève pour dénoncer de la même manière, l’enquête du NIST.

    J’ai hâte de voir le résultat du vote de L’A.I.A. déposé hier le 16-04-2015

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