The Daily Mail : Affaire de l’anthrax, des questions toujours sans réponses

Le Procureur général Dominic Grieve a refusé vendredi dernier (10 juin 2011) de donner suite à la requête faite par une équipe de médecins britanniques pour que soit rouverte l’enquête sur la mort mystérieuse du Dr. Kelly en 2003. Malgré les innombrables zones d’ombre et  les invraisemblances évidentes qui entourent cette affaire du suicide supposé de ce spécialiste(*) qui avait été chargé à l’époque par la Grande-Bretagne d’évaluer la dangerosité des armes de destruction massive en possession de Saddam Hussein, le procureur vient donc de classer l’affaire en demandant à tous "d’en finir avec les théories du complot", déclenchant la fureur du groupe de médecins qui menace de le poursuivre… devant les tribunaux.

Nous vous proposons ici la synthèse établie par Sue Reid, journaliste au Daily Mail, qui reprend et analyse les principales questions toujours en suspens au sujet de cette mort plus que suspecte.

 

Pas de réouverture de l’enquête sur la mort du Dr. Kelly.
Le procureur général appelle à la fin des "théories du complot"

 


 

Affaire de l’anthrax, des questions toujours sans réponses

Par Sue Reid, The Daily Mail, 10.06.2011

Traduction Jacques pour ReOpenNews

Depuis la mort du Dr Kelly il y a huit ans, le Daily Mail ainsi que de nombreux activistes ont soulevé des questions cruciales sur le pourquoi et le comment de sa mort. Le Procureur général a rendu publique toute une série de documents dans le but de fournir une réponse aux mystères qui subsistent toujours. Sue Reid examine les principales explications.

 
Question : Pourquoi l’investigation (inquiry) de Lord Hutton sur la mort du Dr Kelly n’était-elle pas une enquête complète (inquest) ? Pourquoi n’a-t-on pas obligé certains témoins à déposer ? Pourquoi certains d’entre eux n’ont-ils pas été obligés de le faire sous serment ?

Réponse du Procureur général : L’approche de Lord Hutton était similaire à celle adoptée lors de nombreuses autres investigations publiques. Tous les témoins qu’il a demandé à entendre l’ont été. Lord Hutton a estimé que la qualité de son investigation n’était pas entamée par le fait que les preuves n’ont pas été fournies sous serment. Les preuves cruciales proviennent d’analyses médicales et scientifiques.

Analyse : De nombreuses preuves proviennent de témoins que les activistes jugent peu dignes de foi, malgré le manque d’intérêt du Procureur général, M. Grieve, pour ce sujet.

 * * *

Q : Les règles de travail du coroner [procédure indépendante en cas de mort inhabituelle] stipulent que l’heure et le lieu d’une mort suspecte doivent être enregistrés, mais tel n’a pas été le cas dans l’investigation de Lord Hutton. Pourquoi ces détails ne sont-ils toujours pas connus ?

R : Il n’y a pas de raison de douter du lieu ou de la cause de la mort. Il n’est pas possible de déterminer l’heure exacte de la mort.

A : Il semble incroyable que les faits les plus élémentaires nécessaires à la détermination de la cause d’une mort mystérieuse et soudaine n’aient pas pu être établis précisément.

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Q : Pourquoi l’autopsie fixe-t-elle le poids du Dr Kelly à 59 kg, alors que son médecin l’a estimé à 74 kg peu avant sa mort ? Une erreur sur le poids influence le calcul de l’heure de la mort et cela a conduit certains à affirmer que le corps n’était pas celui du Dr Kelly.

R: L’impact d’une différence de poids sur l’estimation de l’heure de la mort est discutable. Le corps était bien celui du Dr Kelly.

A : Cette réponse ne va pas contribuer à mettre fin aux théories complotistes les plus incroyables, selon lesquelles il a été assassiné et son corps remplacé par un autre.

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Q : Le Dr Kelly est sensé s‘être tailladé le poignet gauche après avoir pris une dose excessive de médicaments. Or, seul un fragment d’un comprimé de proxamol [mélange d’un analgésique dérivé de la morphine et de paracétamol] a été retrouvé dans l’estomac du Dr Kelly. 29 pilules de l’emballage retrouvé dans la poche de sa veste sont « manquantes ». Pourquoi a-t-on assumé, plutôt que prouvé, qu’elles provenaient d’une prescription faite à Mme Kelly, et non pas de quelqu’un voulant le tuer ? La dose était-elle suffisante pour le tuer ?

R : Mme Kelly a déclaré que son mari n’aurait jamais pris une quelconque pilule, même pour un simple mal de tête, mais les indications sur les emballages trouvés sur le corps sont identiques à celles prescrites à sa femme. On retrouve du co-proxamol dans 300 à 400 morts par overdose chaque année et un cinquième des suicides liés à la drogue. Le Service national d’information sur les poisons du Royaume-Uni affirme que la dose fatale de co-proxamol se situe entre 10 et 20 pilules.

A : Des médecins insistent sur le fait que l’estomac du Dr Kelly ne contenait pas ou peu de co-proxamol et que la teneur dans son sang correspond à deux pilules. Les réponses du Procureur général ne font que peu de sens. Pourquoi sa femme n’a-t-elle jamais été interrogée à propos des pilules manquantes ? Peut-on imaginer que le Dr Kelly, un scientifique, choisisse cette mort misérable ? Le niveau d’analgésique dans son sang se situe au tiers du minimum fatal.

  * * *

Q : Le Dr Kelly ne portant pas de gants, comment se fait-il qu’aucune empreinte n’ait été retrouvée ni sur les emballages de pilules, ni sur le couteau lui ayant servi à se trancher le poignet, ni sur sa montre retrouvée sur le sol à proximité, ni sur ses lunettes ou sur son téléphone mobile dans la poche de sa veste ?

R : Il n’est pas rare qu’aucune empreinte ne puisse être récupérée sur ce genre d’objets. Par exemple, le taux de réussite sur un couteau est de 30% et de 14% sur des lunettes, selon la police.

A : Le fait que la police n’ait pas réussi à récupérer au moins une empreinte sur au moins UN de ces objets, malgré les statistiques, est préoccupant.

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Q : Pourquoi Lord Hutton a-t-il ignoré l’hypothèse selon laquelle le Dr Kelly n’avait pas l’intention de se suicider ? Il avait le projet de voir sa fille et n’a pas mis d’ordre dans ses affaires.

R : La prise d’un nombre important de pilules par un homme qui n’en prend jamais, lié à la gravité de la blessure infligée, et au fait de se rendre dans un endroit isolé sont des indications claires d’une intention de mourir. Mme Kelly a témoigné que son mari était dans une détresse profonde. Un professeur de l’université d’Oxford, expert du suicide, s’est entretenu avec les membres de la famille, a lu des documents et a vu le lieu de la mort avant de conclure au suicide.

A : Le Dr Kelly avait le projet de retourner en Irak et a déclaré à des amis, juste avant sa mort, qu’il avait hâte d’y aller. Ils affirment qu’il n’avait rien d’un homme sur le point de se suicider.

  * * *

Q : Le Dr Kelly avait-il la force de se trancher le poignet ? Mai Pedersen, une amie, a mangé avec lui juste avant sa mort et a déclaré qu’il avait eu de la peine à découper son steak, du fait d’une vieille blessure au coude droit.

R : L’autopsie n’a pas révélé de cause physique empêchant le Dr Kelly de se trancher le poignet. Il est évident qu’une personne voulant se suicider est capable d’entreprendre des actes douloureux dont elle serait incapable dans d’autres circonstances.

A : Mai Pedersen a fait part de son souhait de témoigner, mais n’a pas été invitée à le faire. Son témoignage sur la capacité du Dr Kelly à se suicider n’a donc pas été pris en compte.

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Q : Un ambulancier a déclaré qu’à son arrivée sur le lieu de la mort, le Dr Kelly gisait à plat, à quelque distance d’un arbre. Les personnes qui ont découvert le corps à l’aide d’un chien disent l’avoir trouvé appuyé contre un arbre. Le corps a-t-il été bougé ?

R : Il n’y a pas de raison évidente pour justifier un déplacement du corps. Toutes les analyses convergent pour dire qu’il est mort là où il a été trouvé. Il était couché sur le dos et non appuyé contre un arbre.

A : Une différence énorme qui n’a pas été résolue par l’investigation de Lord Hutton. A un moment donné, Lord Hutton a empêché les avocats de poser des questions qui auraient permis de découvrir la vérité.
 

Sue Reid

The DailyMail, le 8 juin 2011

 

Traduction Jacques pour ReOpenNews


 

Note ReOpenNews : (*) Le Dr. David Kelly était en train d’écrire un livre à haut risque pour le gouvernement  britannique avant sa mort mystérieuse. Il avait l’intention de révéler qu’il avait averti le premier ministre Tony Blair qu’il n’y avait aucune arme de destruction massive en Irak plusieurs semaines avant l’invasion américano-britannique. Il avait eu des discussions avec un éditeur à Oxford et cherchait des conseils sur jusqu’où il pouvait aller sans enfreindre la loi sur le Secret Défense. Après sa mort, ses ordinateurs avaient été saisis et on ne sait toujours pas si un quelconque brouillon du livre avait été découvert par les enquêteurs et, si oui, ce que ce matériel est devenu. Le Dr Kelly avait également l’intention de lever le voile sur un scandale potentiellement plus important, sa propre implication secrète dans le programme de guerre bactériologique du régime d’apartheid en Afrique du Sud.

 


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Pour en savoir plus sur l’affaire de l’anthrax, lisez le remarquable ouvrage de Francis Boyle : "Guerre Biologique et Terrorisme", paru aux Éditions Demi-Lune

Ce livre traite d’un sujet trop ignoré bien que d’une importance considérable. Liant le développement des capacités militaires US en matière de guerre biologique aux attaques à l’anthrax sur le Congrès en octobre 2001, BOYLE jette une lumière nouvelle sur les vraies raisons de ces attaques : l’instauration d’un système politique liberticide et le développement phénoménal de la recherche US sur la guerre biologique qui s’accorde avec les projets néo-conservateurs de guerre préventive biochimique.

 

 


 

 





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